Je ne veux pas aller là. Pas y aller. Parce que je veux m’asseoir, puis m’allonger pour ne voir que le ciel, un instant fermer les yeux. Depuis le banc de Camden Town, le design des mobiliers urbains de l’architecture hostile ose tout. Dans tous les lieux de la ville, dans les ruelles de ses quartiers anciens, dans le grand futur de son expansion.Les interstices doivent disparaître de l’espace public, être rendus inaccessibles, inconfortables, interdits. Boulons, clous, pics, galets sont dépassés. Place aux cactus décorant l’entrée de l’immeuble, aux sièges individuels contre les bancs, des vigiles au contrôle, les plans inclinés dans le métro, des lumières bleues pour les veines des toxicos, la lumière rose pour l’acné des ados, les appuis ischiatiques pour toutes et tous, sans-abris, femmes enceintes, handicapés, personnes âgées. Passer du dissuasif au répressif, les villes donnent la chasse. Leur mobilier urbain est une arme. Les SDF, des humains réduits à trois lettres, sont la cible. La vieille grosse dame qui ne peut plus s’asseoir faute de banc est une victime collatérale. Je ne veux pas aller là. Pas aller où nous sommes.
Je cherchais ça il y a trois jours en écrivant la 17. Dire le mobilier qui fait la chasse. Jette. Rejette. Donner la chasse. Donner pour détruire. repousser éliminer… Merci Ugo.
Très juste, et comme j’aimerais aussi fuir tout ça, m’allonger sous le ciel. et merci je ne savais pas que ces monstres avaient un nom, appui ischiatique, ça fait vraiment rêver, un don pas venu du ciel.
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