#40jours #02 | intérieurs sans personnages

Rue Saint Genès, 21h. Alignement d’échoppes.

Une grande pièce s’allume de rouge, les murs sont rouges, les tentures sont rouges. On est parcouru d’un frisson devant l’image d’une telle décharge chromatique.

Des rideaux sont tirés dans une maison un peu plus loin, ils glissent lentement sur le rail et s’agitent encore quelques instants dans un frou frou de velours.

D’une fenêtre ouverte, on entend un cri. On pense à un chien ou à un bébé.

Un velux est resté ouvert malgré la pluie, on imagine le parquet flottant en fines lattes de bambou se gorger d’eau et gonfler.

Des fumées s’échappent d’une bouche d’aération et enveloppent la rue d’un brouillard vaporeux.

Un ploc ploc ploc régulier tombe d’une gouttière, la source naissante achève un peu plus loin sa course dans le caniveau.

Le rouge furieux du salon éclairé clignote. Il offre, du balcon, son spectacle. Ça va bientôt commencer.

Le claquement du velux retentit au même moment.

Les rideaux s’ouvrent sur un étrange tableau. On essaye de voir, on ne fait jamais que deviner les intérieurs secrets.

Une femme peinte en trompe l’œil sur la façade d’une maison, de dos, accoudée au rebord d’une fenêtre, regarde au loin vers la mer. Elle seule perce l’épaisseur des pierres.

Un chien hurle au loin. Un bébé ?

A propos de Olivia Scélo

Enseignante. Bordeaux. À la recherche d'une gymnastique régulière d'écriture.