Chaque mercredi, il prend le métro en fin d’après-midi. Sorti de l’eau, le sable était rouge. Les marches de l’escalier, le sol au revêtement noir qui brille un peu. Il passe son navigo au-dessus du détecteur et le portillon s’ouvre. Il attend sur le quai au milieu d’affiches qui changent régulièrement. L’ombre reculait vers la falaise, grimpait un peu puis disparaissait complètement. Le train arrive, il active la poignée et entre s’asseoir sur un strapontin proche de la sortie. Il n’a que deux stations. Nous grimpions lentement le chemin sec et caillouteux. Une villa épineuse faite de planches, de ferrailles et plantes à grosses épines dangereuses. À l’intérieur : une table et quelques chaises, un coin surélevé pour se coucher. La villa était toujours vide et semblait impénétrable. Il descend du train à la station Bastille, la sonnerie de fermeture des portes retentit. Il croise plus de monde à cette station. Elle est un carrefour important entre plusieurs lignes. Il marche dans les couloirs vers la ligne huit. Nous grimpions encore et la chaleur nous écrasait. Les pierres roulaient sous nos chaussures. Parfois l’un d’entre nous dérapait dans la poussière et se relevait avant d’être complètement par terre. Un pied devant l’autre. Le chemin était indiqué par des flèches bleues et des points rouges, des amoncellements de pierre. En prenant de la hauteur, nous voyions la mer bleue ; sur le quai le panneau annonce l’arrivée du prochain train dans deux minutes ; bleue, sombre, immense, arrêtée par une longue côte montagneuse et sèche. Nous montions encore. La pente devenue de plus en plus raide, nous ralentissions le pas. Le métro arrive, il actionne la poignée, la sonnerie de fermeture des portes retentit, il s’assoit sur une banquette et descendra à la Porte Dorée, dans sept stations. Ce qui avait été une église ou une tour, plus personne ne savait. Ces quatre murs de pierres assemblés en un carré pas plus haut que la poitrine étaient l’endroit le plus frais. Un courant d’air permanent y tournait et retournait. Nous le savions en nous en approchant. Parfois, il aime marcher jusqu’à la station Ledru-Rollin, il y’a une bonne librairie où il aime s’attarder. À partir de là, nous étions, tout à coup, au-dessus de la ville. Au-dessus des toits rectangulaires, au-dessus des terrasses où séchait le linge où des citernes d’eau chauffaient à côté de panneaux solaires. Il aime aussi la librairie de l’avenue Daumesnil juste après la place et sa fontaine aux lions. Nous descendions. Le chemin s’élargissait avant de devenir une petite rue peinte en blanc puis quelques marches nous indiquaient que nous étions en ville. Porte Dorée, le quai, un premier escalier. Le bruit des passants, les véhicules, les chats errants, les restaurants, les boutiques de conneries et la galerie d’art, la librairie, le supermarché, l’entrée de l’hôtel, les escaliers, la porte de la chambre numéro cent trois, la porte de l’appartement au quatrième étage, la chambre, une sorte de grotte blanche, ses portes arrondies, le salon, le lit, le bureau. Les chaussures pleines de poussières sur la terrasse, les chaussures et le sac à l’entrée, la veste dans le cagibi, le maillot de bain sur le sol. Nous prenions une douche, puis c’était l’heure de la sieste. Il prend une boisson dans le réfrigérateur et va s’asseoir dans le canapé.
Magnifique entrelacs, Romain !
Un retour « habité »…
Merci pour cette super lecture !
Oui entrelacs qui se croisent et qui résonnent l’un dans l’autre. Merci Romain
montage parallèle – comme au cinéma – il pourrait s’en passer, des choses…
Grande habileté à croiser deux temps, deux lieux … et le je avec le nous. Ce texte m’a bien plu. Merci