Illustration : photo d’une œuvre d’Ambroise Tièche : » Zone Pavillonnaire », 7 enveloppes rectangulaires blanches avec fenêtres, rabats ouverts – on dirait 7 petites maisons identiques -, plexiglas, cadre alu.
Un peu après l’arrêt du tram, un petit bout de ruisseau. Il disparaît sous ma ville, dans le sombre d’un collecteur grillagé. En passant, en mesurer le niveau à l’œil. À l’étiage, souvent cru apercevoir l’ombre d’un gros poisson hanter le fond gravillonné. Au printemps, la densité du couvert végétal dans et au bord du petit cours d’eau. Les racines de grands arbres à s’y rafraîchir. Parfois, regarder les cannettes en alu que les ados jettent à la surface pour les voir flotter puis couler. Plusieurs fois aussi, des caddys de l’hypermarché tout proche, balancés par-dessus la glissière en rondins de bois et échoués dans son lit. Aux pluies d’automne les plus fortes, de grosses eaux grises débordent et forment des flaques sur la route. Jamais pu remonter aux sources à cause du mur d’enceinte du vieux manoir devenu boite de nuit « La Marquise » d’où sort ce ruisseau. Google apprend qu’en 2019 un ensemble de petits immeubles a été construit sur la discothèque. L’alignement des pavillons de plain-pied ou à un étage. Façades blanches, volets sombres, toits aux pentes de tuiles rouges; tous construits en retrait de la petite route et séparés d’elle par des jardins d’agrément avec haies. Un original avec des volets lavande. Sur Google, les haies ont poussé touffu et les volets exotiques repeints aux couleurs locales. Les vieilles petites maisons de village, collées à la petite rue de plus en plus étroite, agglutinées aux pieds de la falaise. Virage serré. Juste après le permis, la 4L râpée contre l’angle. L’entrée du parc et, trop souvent, la chienne du concierge, un berger allemand qui fonce sur tout ce qui bouge. Toujours cette appréhension à s’engager alors, en catimini pour ne pas l’attirer. D’après Google, le vieux portail et ses colonnes de pierre ont été remplacés par un plus standard : automatique, métallique et vert foncé. De ces retours lycée/fac, aucune image avec habitants croisés autrement qu’en voiture. Seuls être vivants : le gros poisson, les grands arbres, les haies et le chien.
Codicille : trajet de retour pendant 7 ans à la fin de l'adolescence. Jamais refait depuis plus de 25 ans. Retour ce soir à l'écrit en 3/4 images puis, avec street view, avant-derniers ajouts au texte.
touchant ce parallèle entre le souvenir et le constat via Google
Restent les animaux et les arbres…