Magali c’est la première, les années 1990, début 2000, tu ne sais plus exactement, c’est l’intellectuelle, étudiante en anthropologie en Colombie venue à Bruxelles pour gagner un peu d’argent afin de poursuivre ses études, tout de suite tu t’entends bien avec elle, vous discutez tandis qu’elle nettoie, tu aimes son approche, ses idées, ses initiatives, un jour elle a nettoyé et réorganisé une de tes armoires bien mieux que tu ne l’avais fait, tu te souviens que lors d’une de vos conversations vous avez évoqué la décorporation, elle en avait faite une, ce genre de sujets te fascine, après quelques années elle retourne en Colombie et c’est elle qui te recommande une de ses amies, colombienne aussi
Carmen, autre style, installée à Bruxelles avec son compagnon colombien qui fait des travaux d’homme à tout faire, comme avec Magali le courant passe bien avec tes enfants, faire des ménages c’est un job lourd mais tu ignores si elle a un horaire plein, elle est toujours souriante, elle n’a pas l’air exténuée, vous parlez de sujets liés au quotidien et que ce soit avec elle ou celles qui ont suivi, tu ranges toujours tout avant leur passage car tu estimes que ranger un éventuel désordre ne fait pas partie des tâches qui peuvent leur être assignées, que le désordre est un manque de respect à leur égard, tu n’as pas l’impression que cette besogne lui soit pénible et puis un jour elle aussi ne vient plus, le motif t’en échappe, car elle reste à Bruxelles, après d’autres lui succèdent jusqu’au jour où arrive
Nadine, Belge bruxelloise, la seule d’entre toutes, à peine quelques années de moins que toi, elle te fait même de petits travaux de couture, elle te recommande son frère pour travaux de peinture, sa sœur possède une entreprise de nettoyage industriel, elles sont du métier, et de fait, elle est très compétente, prend son travail à cœur mais la pénibilité de la tâche, vu son horaire à temps plein, la rattrape, elle fait tendinite sur tendinite et un beau jour, la douleur l’empêche de travailler pendant de longs mois et tu le sens, elle ne reviendra plus.
C’est très étonnant, ce va-et-vient entre l’amitié (dense et spontanée) et tout ce qui a trait au travail, peut-être dans une grande maison on ne sait pas, mais c’est étonnant, là où le rapport maître à serviteur – même moderne – aurait pu se glisser, mais non, simplicité du travail qui adoucit et renivelle l’échange, où chacun fait sa part pour alléger l’autre
Merci Françoise pour ton passage ! Une amitié aurait éventuellement pu naître avec Magali, mais elle n’est pas restée assez longtemps. Toujours je les vouvoie pour garder quand même la distance à la fois du cadre professionnel et du respect. Au début, un appartement, ensuite une maison de taille moyenne 🙂
Le rapport des femmes employant des femmes….aux tâches dévolues aux femmes (par tradition, de fait), à la première on croit une amie, à la deuxième on est saisi, et à la troisième le système complexe de l’aliénation paralyse, la phrase elle ne reviendra plus, donne le ton : on attend la prochaine…
Merci Catherine 🙂 Peut-être n’ai je pas été suffisamment clair pour la 2e, le motif m’en échappe aujourd’hui car je ne m’en souviens plus. J’ai sans doute dû le savoir à l’époque. La prochaine, c’est-à-dire l’actuelle, c’est une Polonaise (il y en a eu d’autres), il n’y a pas vraiment d’atomes crochus, question de personnalité 🙂