Je rêve d’une promenade en ville où sous un soleil brûlant je trébucherais sur les mots comme sur les pavés, où je partirais à la rencontre des récits qui m’ont toujours échappé. Je rêve d’une promenade en ville qui révèlerait les dessous secrets des intérieurs masqués, d’une promenade dans la ville déserte qui s’éveillerait à chacun de mes pas. Je rêve d’une ville qui s’ouvrirait sur les champs, qui laisserait défiler à perte de vue toits et blés, d’une ville couverte de roses et bourdonnante de ruches pour nourrir mon inspiration bucolique. Je rêve du soleil éblouissant la ville, d’un soleil comme un poète qui arrache les béquilles et qui métamorphose les choses les plus viles.
Mais je ne suis pas poète et il pleut sur la ville en ce dimanche de juin triste comme un jour sans fin. Et je me souviens des vers de Baudelaire marcheur parisien, du soleil, de sa muse, de l’escrime quotidienne, du désespoir de l’impossible formule.
Et murmure tout bas…
Le long du vieux faubourg, où pendent aux masures
Les persiennes, abri des secrètes luxures,
Quand le soleil cruel frappe à traits redoublés
Sur la ville et les champs, sur les toits et les blés,
Je vais m’exercer seul à ma fantasque escrime,
Flairant dans tous les coins les hasards de la rime,
Trébuchant sur les mots comme sur les pavés,
Heurtant parfois des vers depuis longtemps rêvés.
C’est très beau, ce rêve de promenade en ville. On s’accroche aux premières rimes, on s’arrime et rien ne décroche. Merci pour ce beau moment de lecture.