Comme un cheval qui branle sa tête pour se dégager du mors, oui, je bégaie, bégaye, bègue. La ville n’est pas en cause que je parcours, que j’aime ou déteste, que je peux fuir si elle m’oppresse, m’agresse, me stresse. Pas plus l’Histoire qui, elle, ne se prive pas. Les lettres, les consonnes dures, longtemps crues fautives, sont toutes aussi innocentes. Les croire responsables, c’est se tromper d’adversaire, se mentir à soi même, jusqu’à se punir, jusqu’à s’interdire. Les Autres, seuls les Autres, font obstacles aux mots, les enfoncent dans ta gorge, les paralysent en toi. Se dégager du mors des Autres. Et mordre s’il le faut ceux qui prétendent te faire attendre que les mots viennent.
Flaubert nous interpelle, tous, toutes, autant que nous sommes : « croyez-vous donc qu’avec vos misérables mots, votre style qui boite et votre imagination qui bégaie, vous parviendrez à rendre une parcelle de ce qui arriva cette nuit-là ? »
Codicille : oser demander à un bègue de bégayer relève – selon moi- d’une perversité cruelle comme pratiquer une autopsie sur un être encore vivant. Mon refus est catégorique. C’est NON.
Je pense souvent à Flaubert ces temps-ci. Et comme il avait raison de gueuler quand on continue de bégayer sans fin. Merci pour ce texte qui éveille !
Merci Ugo votre pour votre refus catégorique. Forte (et parlante) ton image du cheval : « Se dégager du mors des Autres ». NON est aussi un beau palindrome !
Merci Helena, merci Nathalie. Ce sont vos écritures qui souvent m’éveillent. Merci de passer par là et de m’entraîner dans vos chemins.
Et puis un jour ou un soir, on n’a plus envie de bégayer, juste de s’égayer en écoutant les autres.
« Se dégager du mors des Autres »: boum! Explosion dans mon petit crâne. Tu sais, je crois qu’écrire chez moi c’est un peu ça. J’y libère une partie de moi à laquelle personne n’avait accès et c’est hyper étonnant de découvrir ces parcelles de moi.
Et mention spéciale à ton NON retentissant: toujours consentir, même en écriture 😉