Je ne suis pas tranquille ma sœur, dedans ça trouble quand tu rentres en intérieur, les ombres du plafond font si beaux sacrifices, la tête en coquille sur un socle de mer, les maisons assourdies par le froid des rochers, bats la cadence, interne-toi, toi l’interne, la fille dans un coin, dans un coin dans une pièce, comme on rejoint un angle pour fondre sa rondeur, le coin de ta chambre est un pic d’atmosphère, claquemure les pleuvines, j’entends doucement pleurer ta douceur, ça ira mieux dans l’avenir, présent poussé plus loin plus loin, présent poussé sur une étoffe, la plénitude est mouvement d’autre jour, ça ira mieux demain, ça ira mieux sur un fil, élevé d’un degré pour un peu de hauteur, élevé d’un degré pour décoller de la mer, va en dedans, sacrifice marine, les algues sur ta tête ont une sagesse d’orage, regarde pas, regarde pas, hors l’entier fort, va à la nage, le chant faibli est ton amorce, toutes ces forces contre toi, faut détourner, écoute encore, tu m’as toujours redit qu’il n’y a plus rien à dire, que le dire c’est redire, qu’il ne sert plus à rien, dire les choses c’est décroître, dire encore c’est décroire, écoute-moi pourtant, je parle juste pour te parler, c’est une voix de circonstance, je fais attention, je te connais, mais j’existe puisque ma voix, tu existes tant pour moi, écoute encore ce qui surgit, le flot ininterrompu, pour brandir ce qui fait, notre merveilleuse faiblesse, notre faiblesse à deux, bien plus riche que la force, je te rejoins, sur ton cœur conifère, le bon battement d’eau dans les leviers du cœur, presse et compresse, l’avidité à taire, presse et compresse, l’avidité à vivre, presse et compresse, à ton cri Azadi, à ta bouche Azadi, à ton corps Azadi, à toutes les poussières, à recueillir le sang, tu es le blanc silence qui rentre dans tes pas, tu tournes en cycle dans la pièce, et le vertige monte en mes jambes, le premier tour n’est pas dernier, il revient net, entraîne le sort, continue je te rejoins, tu la sœur du premier jour, la mer entière dans un galet, un corps vivant dans un angle, et fier téléporteur est ton chant conifère, il faut changer ce grain du temps, ouvrir un sol, ramper vampire, désintégrer le chant relais, se désapprendre, se disculper, couvrir ses bras d’amples couleurs comme une grotte en écritures, tu es ma crique à courants d’air, laisse tomber tes cheveux verts, feront des plantes en intérieur et du vert tendre tout en bas pour qu’en maison te désaltère, joie de sourire d’envoyer loin tout artifice qui t’entenaille, respire une ombre respire un tiers respire en tout ce qui sommeille, défais le dur qui t’affaiblit, joie d’avancer sans te déplaire, ton chant est faible et me contente, où le ton grave est un délice, ne crois pas ça que tu es seule, je hante en toi ton intranquille.
Quel beau texte, ample et musical, tout en volutes et en lames de fond à la fois.
Merci Françoise pour cette partition que j’aimerais bien entendre.
Chaque mot de ce texte s’imprègne en nous comme une mélodie. Quelle beauté et quelle poésie !
Voilà c’est de la poésie et c’est difficile de dire quelque chose qui ne soit pas con sur la poésie, déjà je me suis bien retenu sur un précédent qui finissait sur le mot regret c’était déjà de la poésie mais j’ai rien dit
« je te rejoins, sur ton cœur conifère, le bon battement d’eau dans les leviers du cœur, presse et compresse, l’avidité à taire, presse et compresse, l’avidité à vivre, presse et compresse, à ton cri Azadi, à ta bouche Azadi, à ton corps Azadi » Là encore, la prosodie prend son élan et tisse un voile transparent entre les destinées, l’écriture comme caresse et mouvement d’approche délicate, éloge des « cheveux verts » et de « leur chant faible », comme les cheveux d’Ophélie surnageant doucement au coeur d’un naufrage. ,