L’enfant dans le corridor, l’enfant dans la cave, l’enfant dans la grange, l’homme ne sait pas, ne sait plus, mais il y avait un enfant, il y avait ce dessin de cheval, où est-il passé, ce dessin de cheval, un cheval blanc, celui de cet endroit qu’on appelait l’écurie au cheval, mais le cheval est mort, dit-on, le cheval est parti, il n’y a plus rien, le corridor est vide et ce n’est plus un corridor, se dit l’homme, ce n’est pas la cave, ça ne pue pas la choucroute rance, il n’y a pas de confiture, c’est autre chose, un autre lieu, c’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, c’est écrit, mais ce n’est pas la grange non plus, et l’enfant, qui est-il ? L’homme regarde à gauche, regarde à droite, il ne sait pas où sont la gauche et la droite, il n’a jamais su, il regarde au nord, au sud, à l’est, il ne sait pas non plus, ce ne sont que des mots et autour de lui ce perroquet, cette fleur, ce bidon rempli de clous rouillés, il les a déjà vus, l’enfant, et voilà que même qui il est lui-même s’est perdu, est-il l’homme, est-il l’enfant, qui est-il ? L’homme cherche : le cahier, le livre d’Amérique, des paysages, des animaux, des villes, des déserts, il doit bien y avoir quelque chose à quoi s’accrocher, il doit bien y avoir l’enfant quelque part, un papier avec écrit dessus la lettre F., une piscine vide, une échelle à monter, l’enfant ne trouve pas, il n’y a pas d’or au fond des ruisseaux, ce n’est pas San Francisco, ce n’est pas le pays natal, mais c’est ici, c’est tout ce qu’il sait, l’homme, l’enfant, c’est ici, quelque part près de cette table, ici et maintenant, c’est écrit, mais où ? Et surtout : qui a écrit que c’est ici ?
Oh, magnifique ! Avec le parfum du texte du chantier que j’ai tant aimé. L’occasion de le redire ici. Merci.
Merci Anne, ces 40 jours sont pour moi l’occasion de relancer les travaux de mon chantier et de tels commentaires ne peuvent que m’encourager à aller jusqu’au bout.