dix-huit juin
quand les dés roulent sans qu’on les lance*
il pouvait arriver qu’on monte dans l’arbre – devant la maison de J. (prononcer djé) je me souviens d’un bout de chocolat que j’étais allé manger là-haut – je me souviens du retour de mon grand-père, il revenait avec mon frère d’une représentation du cirque Amar – ils avaient pris le TGM – ça devait être à la capitale – on ne savait pas : moi, je ne savais pas où ça pouvait bien être – j’avais quelques idées du cabinet noir de l’oncle E. qu’on appelait tonton E. qui nous vaccinait contre la polyo – ça ne voulait rien dire sinon cette douleur violente puis continûment durant quelques jours – c’était un soir et revenant de cette représentation, mon grand père était tombé dans le petit chemin (il était de 86) – dans moins d’un mois, on serait sur le tarmac d’Orly – ça venait d’ouvrir je crois bien, maintenant à ces jours-là ne correspondent que des réminiscences de la nuit – je n’ai jamais trop aimé la nuit – le tarmac et la jetée – c’est venu
bien plus tard, j’allais vous accueillir, vous reveniez d’Ierapetra (je n’y étais pas on m’avait volé mes papiers, on m’avait refoulé à l’aéroport – à ces moments-là je me souviens du passeport où nous figurions, tous les quatre mon frère mes sœurs) (dans les bleus) (ma mère était assise dans le Super-Constellation, derrière nous, et des moteurs de l’avion s’échappaient des flammes bleus et jaunes, sur fond de nuages blancs – tu vois c’était pas la misère chantera plus tard un de ces crooners – pas du tout, mais elle viendrait et on la combattrait – ce n’était pas la misère non, mais pas l’aise non plus – de loin – il y a quelques temps je me suis enquis de la paye de mon père à la fin de sa vie à un demi-siècle d’ici (l’institut t’indique les équivalence tsais) vous reveniez de vacances, je les avais passées à refaire faire mes papiers – j’avais rangé lavé nettoyé aspiré dépoussiéré les bibliothèques et toute la maison – il était tard, plus de minuit et là-haut sur la jetée
j’étais monté – ils avaient tendu un filet assez rigide me sembla-t-il ce soir-là au dessus de toute sa surface, à trois mètres cinquante de hauteur au dessus de ce sol de dalles de béton (ici je poserai bien une photo du film de Chris Marker) – vous reveniez des îles -ce soir-là, il nous attendait aussi, ça n’avait pas la même apparence (il conduisait une quatre-cent-trois bleu nuit) la capitale, aucune idée, des immeubles hauts et gris – je ne me souviens plus que de cette église en face d’une des façades du Louvre qui n’était pas musée, mais ministère peut-être – ça ne veut rien dire – une espèce de temple grec ou quelque chose, j’en sais rien – on avait les yeux grand ouverts et on regardait passer la ville au travers des fenêtres vitres baissées de la voiture – c’est assez reconstitué mais pourtant au coin de la rue et du quai se trouve ce café – très longtemps, tu sais comment c’est les chansons, on ne comprend pas bien tout de suite ce qu’elles peuvent bien dire et on invente et j’avais très longtemps interprété l’une des paroles (on ne dit pas vers pour des chansons, non) de cette Mademoiselle Chang qui disait l’amour elle l’appelle non pas Solena ainsi qu’elle le nommait mais Corona ainsi que se nommait alors cette succursale du bureau et de la réception du père de Modiano – ça a changé de nom, de titre, de cafetier et de serveurs – je ne suis même plus sûr qu’il s’agisse encore d’un tabac (le siècle est hygiéniste) – sur ce même trottoir, un peu vers le nord en remontant doublant l’église se trouve la mairie de l’arrondissement où elle vivait – un samedi matin, il faisait un soleil doux comme sait le donner septembre, j’y fus pour y déclarer sa disparition dans la nuit (« trois heures trente » déclarai-je – je n’ai jamais trop aimé la nuit)
des guides des boussoles des compas*
les hôtels aussi bien – ça n’existait pas du tout : celui où nous sommes descendus (car à l’hôtel, on descend) était de l’Univers quand même – ça n’existait que pour une de mes tantes – pour l’autre, son mari (prénommé F.) l’emmenait au Gritti – il conduisait une Lancia et la faisait descendre pour aller s’asseoir à l’arrière quand elle lui indiquait trop le chemin à prendre et qu’il en était agacé (je ne sais s’il l’avait épousée avant guerre mais je crois que oui) (la deuxième, mondiale) (drôle de mec hein) (bon, après drôle de gonzesse aussi je reconnais – elle me surnommait Pierre le Grand c’est pour te dire) – ils n’étaient pas encore partis, ou je fabule – la propriété de Crétéville a été transformée en prison (le régime en a un besoin redoublé – pas certain qu’il dispose de suffisamment de liquidités pour en faire construire – le propriétaire de la télévision de maçon peut y aider – il y a toujours eu aussi des liens importants aussi avec l’Italie, notamment culinaires – déjà du temps de celle qui devait être détruite un siècle et demi avant notre ère : on en avait l’illustration de l’autre côté de la rue dont je m’avise à présent qu’elle a été baptisée (on ne m’en a rien dit) en avenue Didon (de la reine – ce qui pourrait corroborer sinon prouver mon attachement à STGME2) – un jour, tous seront partis – tous – les ruines, toujours et partout – en descendant en clopinant à cause des petits cailloux (il n’a jamais été la moindre question d’acheter des petites chaussures de plage) à main gauche d’autres ruines romaines, des termes datant du deuxième centenaire de ladite ère – chargé d’histoire ? rien à en faire
(plus tard, ça avait une certaine allure que de se prétendre de ce lieu – encore aujourd’hui jte dirais – il s’agit et s’agissait déjà d’une espèce de banlieue friquée où s’installait crème ambassadrice ou autre potentat en exil – il m’arrive parfois d’avoir les images de ces rues désertées à cause des révolutions, des guerres, des exactions et des crimes dont les états aiment à se parer : ce ne sont que des rêves, peut-être) le décor reste le même, les fleurs le blanc de chaux le bleu clair le soleil les petits cailloux le beige et l’ocre et au loin le doux ressac d’une mer tendre et calme
* ce sont des vers qu’on doit à Étienne Roda-Gil (mais non, c’est David McNeil l’auteur, le fils à Marc Chagall, comme quoi, la mémoire des fois…) (blues indigo)
il y a quelque chose de débraillé mais je laisse quand même - s'il faut y revenir, je m'y emploierai - il y a quelque chose avec le codicille qui emmerde le monde aussi alors pourquoi le poser ? - c'est l'établi je suppose - les illustrations ce sera pour une autre fois je suppose aussi -le travail n'est pas fini, ni fignolé - si le titre est terminus je l'ai tordu - ça n'a rien d'un terminus - je tente de poursuivre cette chimère mais il y a quelque chose de l'hommage du respect de la mémoire du resurgissement afin qu'il et elle revivent un peu - ça ne se dit pas ni ne s'écrit mais je n'aime pas ce type de correction (en général je n'aime pas les corrections de quelque type qu'elles soient) - parce que cette politesse sans doute fait partie de sa famille à lui - moins à elle - ces deux familles-là - le fait de faire ce voyage vers le terminus en avion, alors que très longtemps, elle vécut juste à côté de celui de la compagnie aérienne, sur l'esplanade - son terminus à lui serait sur ce continent, comme le sien à elle - (le titre que je retiens est aussi celui d'un film de Claude Chabrol avec Stéphane Audran Anna Douking Michel Bouquet et François Périer entre autres) - le passage de la jetée aux hôtels est à mettre sur le compte de Patrick Modiano et de son appétence pour ce genre d'établissement
Je connais bien David McNeil, il m’a écrit une chanson ^^
eh bien ! :°)
ça doit être un peu débraillé puisque j’ai été émue (à vrai dire ça ne l’est pas me semble-t-il)…