#40 Jours #06 Plusieurs pistes

PISTE N° 1 D’abord l’encombrement des étagères avec ces cartes en accordéon ,format 40 x2 0cm environ, si difficiles à replier. Le chef de famille n’a jamais confié à quiconque le soin de consulter avant lui ces trésors. Nul ne plie ni ne déplie cette carte froissable et déchirable sans son consentement. Instant suspendu dans l’auto, la passagère ne moufte pas, elle attend les ordres en pouffant dans son foulard, elle ne conduit pas, n’a pas voix au chapitre, les mômes ne s’en mêlent pas. Sur une étagère de bibliothèque,tous les départements sont alignés à plat par ordre de numéro, bien visible. Il suffit de tirer la carte dont il a besoin et la remettre à sa place. Ce pourrait être l’occasion de vérifier si on connait par coeur la France. Mais on se lasse vite, si on n’y va pas pour de vrai, ça ne sert à rien, et on ne peut pas écrire dessus (sauf lui au stylo rouge). Mais en fait , on va toujours au même endroit l’été. Quand on travaille on n’a pas le choix. Et même l’itinéraire Bis on le connaît sur le bout des panneaux. D’ailleurs pour les routes locales, 100 kms à la ronde c’est le maximum en une journée aller retour. qu’on puisse faire en bagnole, il n’y a donc pas besoin de carte pour ces cas là. A quoi servent-elles au juste ? .

Avec l’abonnement à Géo d’autres cartes sont arrivées dans la baraque, puis beaucoup plus tard, des plans de villes, étrangères aussi. Ce fut le temps des voyages imaginaires et secrets.

Le seul voyage lointain en fait, fut l’Afrique dans les années 50-55. L’Avion y allait direct depuis Paris. Jusqu’à la brousse, les pistes infernales et les ornières à 50 kms de Yaoundé. Voyage initiatique, voyage inoubliable, bonheur familial et tribal non encore archivé… Trois ans de dépaysement en des conditions à la fois oppressantes et libératrices jusqu’au rapatriement forcé. Le paludisme a mis fin au rêve, les trois premiers enfants tout petits ne pouvaient pas rester sans risquer leur santé. Tout ça c’est du passé.

Heureux qui comme Ulysse et même sans boussole se souvient qu’il n’a pas vraiment voyagé par la suite. Mais les cartes, complaisantes et discrètes ne s’en souviennent pas

ANCIENNE PISTE

PISTE N° 2 Aller à pied jusqu’à St Jacques de Compostelle. Le mythe du pélerin exalté,avec son coquillage suspendu sur sa poitrine.Voyage initiatique lui aussi et sabbatique parfois. Pour en parler, il faudrait l’avoir tenté. Il faut dit-on , plusieurs semaines et un bon entraînement à l’effort.Supporter les blessures, les ampoules aux talons, l’essoufflement, la solitude ou la promiscuité dans les gîtes d’étape.Renoncer à pas mal de choses et au confort pour dormir. L’odeur des pieds, et l’horreur des ronfflements . Parler espagnol et fréquenter la curetaille ou les prévôts qui tamponnent les pages du carnet de route au fil des étapes officielles. Acheter des breloques et envoyer des cartes postales. Le défi est beau mais l’ennui peut pointer son nez. Sans bagage spirituel, difficile de braver la sensation d’inanité et d’inutilité d’un tel périple.

MAUVAISE PISTE ?

PISTE N°3 La Carte du Tendre.

La Carte du Royaume de Tendre, figure dans le premier tome de l’ouvrage de Madeleine de Scudéry : « Clélie, Histoire Romaine » (mi XVII°). L’idée est de représenter les transports amoureux sous la forme d’un réseau de villages et de liaisons.

Elle est dans leur chambre depuis plus de quarante ans en double exemplaire, cartes postales jumelles, accrochées aux ailes d’un papillon en bois couleur acajou entoilé de tissu beige clair;.

On ne sait pas à quoi elle sert. Mais elle se lit de façon confidentielle et sans témoins.

PISTE MAGIQUE

A propos de Marie-Thérèse Peyrin

L'entame des jours, est un chantier d'écriture que je mène depuis de nombreuses années. Je n'avais au départ aucune idée préconçue de la forme littéraire que je souhaitais lui donner : poésie ou prose, journal, récit ou roman... Je me suis mise à écrire au fil des mois sur plusieurs supports numériques ou papier. J'ai inclus, dans mes travaux la mise en place du blog de La Cause des Causeuses dès 2007, mais j'ai fréquenté internet et ses premiers forums de discussion en ligne dès fin 2004. J'avais l'intuition que le numérique et l 'écriture sur clavier allaient m'encourager à perfectionner ma pratique et m'ouvrir à des rencontres décisives. Je n'ai pas été déçue, et si je suis plus sélective avec les années, je garde le goût des découvertes inattendues et des promesses qu'elles recèlent encore. J'ai commencé à écrire alors que j'exerçais encore mon activité professionnelle à l'hôpital psy. dans une fonction d'encadrement infirmier, qui me pesait mais me passionnait autant que la lecture et la fréquentation d'oeuvres dont celle de Charles JULIET qui a sans doute déterminé le déclic de ma persévérance. Persévérance sans ambition aucune, mon sentiment étant qu'il ne faut pas "vouloir", le "vouloir pour pouvoir"... Ecrire pour se faire une place au soleil ou sous les projecteurs n'est pas mon propos. J'ai l'humilité d'affirmer que ne pas consacrer tout son temps à l'écriture, et seulement au moment de la retraite, est la marque d'une trajectoire d'écrivain.e ou de poète(sse) passablement tronquée. Je ne regrette rien. Ecrire est un métier, un "artisanat" disent certains, et j'aime observer autour de moi ceux et celles qui s'y consacrent, même à retardement. Ecrire c'est libérer du sentiment et des pensées embusqués, c'est permettre au corps de trouver ses mots et sa voix singulière. On ne le fait pas uniquement pour soi, on laisse venir les autres pour donner la réplique, à la manière des tremblements de "taire"... Soulever l'écorce ne me fait pas peur dans ce contexte. Ecrire ,c'est chercher comment le faire encore mieux... L'entame des jours, c'est le sentiment profond que ce qui est entamé ne peut pas être recommencé, il faut aller au bout du festin avec gourmandise et modération. Savourer le jour présent est un vieil adage, et il n'est pas sans fondement.

Un commentaire à propos de “#40 Jours #06 Plusieurs pistes”

  1. Ces pistes tantôt drôle en imaginant les scènes ou alors se reflétant dans des réflexions personnelles. Merci