Feuilles IGN au 1/25 000ème pour l’analyse spatiale des aménagements, pour l’histoire des habitants par la toponymie. Les mêmes, dans leur version géologique multicolore pour les coupes géomorphologiques, quand l’étude du dessous prétendait tout expliquer de notre vie au-dessus. Ces couches de sédiments comme gros morceaux de pâte à jamais figés. Cette journée de printemps à crapahuter et à analyser dans l’espace même de la carte. Les mêmes encore, version cartes topographiques IGN série bleue pour les premières sorties VTT ou les marches d’approche militaire. Ce rêve de les étaler toutes pour faire carte monde du pays. Cette abstraction des zones de vert clair, le sombre des courbes de niveaux resserrées et les petits rectangles/carrés noirs des habitations. Hors ces traces, pas d’humains. Ces fac-similés des cartes d’État-major des grandes batailles, sans les centaines de milliers de corps et leurs souffrances. Cartes muettes, les mots pour les faire hurler. Aujourd’hui, les images satellites ont tout remplacé, ce que le zoom permet, ce que le petit bonhomme orange montre. Cette carte, cette carte de capes et d’épées, la première imaginaire, avec les lieux du voyage de Bilbon Saquet. Combien de temps on s’y est perdu ? Pour soi épigone, un premier livre bricolé avec dessin du plan d’une ville médiévale pleine de monstres et pour accompagner, petit guide alphabétique des personnages et lieux remarquables. Aussi, cette carte perdue dans les rudes successions familiales, cette carte roman en papier de soie avec, tracé de sa main, le périple de l’aïeul et son voyage de sept ans pour rentrer de la Russie bolchevique après large détour par l’Asie. Ce Guide Bleu aussi, acheté en vide grenier pour rien : Moyen-Orient, édition 1965. La carte très simple de Pétra, ce chapitre sur « Les villes mortes de la Haute-Syrie ». Jamais vraiment lu, mais là, comme relique sanguinolente. La ligne rouge, jamais dessinée sur les cartes de Syrie.
Jérôme, ton texte est très beau. Merci. C’est fort ce qu’amène cette proposition avec toi, vraiment.
Des villes mortes peut-être, mais dont le cœur bat sous ta plume, merci ! Et cette phrase : « Ce rêve de les étaler toutes pour faire carte monde du pays »