Le souvenir est dans la chambre du fond. Odeur de naphtaline. Du balatum beige. Tapisserie claire à motifs anciens et incertains. Au centre de la pièce un pilier de bois sombre soutient une poutre perpendiculaire qui traverse/renforce le plafond, assez bas. Un petit lustre art déco diffuse une faible lumière orangée. En dessous, une table ronde recouverte jusqu’au sol par une nappe fine et sombre d’où pendent des glands en tissu. Quatre chaises autour. Un grand lit deux places. La tête de lit et le couvre-lit assortis aux chaises : motifs bleus sur fond blanc. De chaque côté, des tables de nuit avec lampes de chevet assorties au lustre. Une petite fenêtre à carreaux. Une commode à tiroirs, un divan beige, un fauteuil avec une assise en rotin. Sur une étagère, un vieux nain de jardin en céramique. Sous son grand bonnet rouge, regard à barbiche, manches retroussées, poings sur les hanches. Une autre commode, identique et en vis-à-vis de la première. La petite bibliothèque avec derrière ses portes vitrées, des rayonnages de livres à vieilles reliures et puis, sur celui du bas où s’entassent des paperasses oubliées, la vieille carte en tissu et le petit carnet noir moleskine. En face, la porte. Retour couloir. Le souvenir entre maintenant dans leur salle de bain. Aveugle, froide, carrelage dans les tons marron/beiges jusqu’au plafond. Une frise géométrique parcourt les murs. Face à la porte, une vasque surmontée d’une glace ovale. Une savonnette sur un porte-savon en faïence assortie. À droite, fichées dans le mur, les deux tiges mobiles d’un porte-serviette. Sur un petit meuble de desserte, un gros flacon d’eau de Cologne ambrée, une bombe dorée de laque, un paquet de coton, une brosse et un peigne, bien rangés. Derrière la porte, un miroir juste en face de celui du lavabo, se voir en abyme soi et son reflet. Retour couloir. Le souvenir file sur la droite, porte suivante, leur chambre. On passe. Le souvenir est maintenant à l’opposé de la chambre du fond, au bout du couloir. Le salon. Cette odeur lourde de fruits rouges. Vieux parquet. Un piano droit, noir et brillant avec deux portes bougies ouvragés autour d’une partition avachie, son tabouret. À côté sur un guéridon, un téléphone gris habillé de velours doré. Derrière, volets clos sur hautes fenêtres à longs rideaux blancs, une table ronde avec un gros vase vide en cristal, quatre chaises, un buffet, une grande lampe à abat jour, et puis là, au centre, son cercueil encore ouvert.
Belle utilisation de mot » son « , il faut finir les textes ici, mais le développement pourrait conduire vers l’humain du piano un moment encore, avant de nous clouer face au cercueil, j’aime beaucoup la visite d’un lieu un peu » neutre » où savon et porte savon sont assortis qui conduit à cet intime du drame à raconter.