Rue Billie Holiday, Montpellier.
Blocs d’immeubles bas, de trois étages, disposés autour de places de parking et d’un parc pour enfants. Des pins apportent un peu d’ombre. Il doit être tôt le matin, le parc est vide. Seul un homme est visible, se dirigeant vers une entrée d’immeuble, en blouson de cuir marron et jeans. Il semble qu’un masque soit glissé sous son menton. Sur l’immeuble à gauche, la façade est blanche, mais vieillie par le temps, des coulures grises descendent du toit plat et des balcons. Au rez-de-chaussée, la petite terrasse est occultée par un grillage d’un vert plastique. La pointe d’un parasol en dépasse, ainsi qu’un laurier rose sans fleurs qui déborde vers la rue. Au premier étage, on ne distingue que le haut des vitres sans rideaux, un volet roulant est à moitié fermé sur la fenêtre de droite. Au deuxième et dernier étage, tous les volets sont descendus. Sur l’immeuble en face, la forme carrée, adoucie par l’arrondi des balcons, est identique. Seules des bandes saumon recouvrant la moitié des balcons coupe la monotonie architecturale. Dans un angle, une benne déborde de poubelles et un carton renversé répand son contenu sur le trottoir. Peut-être des rembourrages d’emballage dans un sachet plastique transparent. Mais rien n’est sûr.
Rue Billie Holiday, Château-Gontier-sur-Mayenne
Depuis le 1 de la rue Billie Holiday de Château-Gontier-sur-Mayenne, on aperçoit un alignement de maisons très récentes, aux façades beige rosé, aux toits gris presque noir, lisses et peu inclinés. Des maisons de plain-pied. Des buissons verts et rouges bordent leur jardin qui se replie vers l’arrière ou le côté de la villa. Chaque maison a un espace pour garer sa voiture sur l’avant et une porte de garage blanche fermée. Seule présence vivante, une femme, qui ne semble pas très jeune, pousse un chariot où sont empilés des magazines, tous identiques, qu’elle glisse dans les boîtes-aux-lettres. Je pense à The Truman Show.
Rue Billie Holiday, Chemillé-en-Anjou
Un lotissement encore en construction. Au sol la route n’a pas encore été faite. Les traces de roue se sont déposées dans la boue. Un camion-benne chargé de débris volumineux et trois fourgonnettes sont stationnés. Des grilles empêchent le public de pénétrer dans les maisons. En face, deux villas mitoyennes par le garage, symétriquement identiques. De plain-pied, entrée dans un renfoncement, légèrement décalé par rapport au milieu, porte grise accompagnée d’un fenestron, deux fenêtres assez petites sur les façades avancées de chaque côté. Les blocs abritant les garages sont rouille, le reste des bâtisses blanc, les toits en tuile couleur brique. Sur la gauche, deux allées goudronnées se déroulent- d’autres portes de garages. Une avancée de jardin, en triangle, est entourée d’un grillage. Quelques branches de buissons naissant émergent de la bordure en ciment. Au centre la terre est nue.
Billie Holiday, je me demandais quels lieux porteraient son nom. Des lieux assez récents bien-sûr, des lieux de lotissements où l'on peut se perdre entre la rue Charlie Parker, Sydney Bechet et Nina Simone... comme on se cherche rue des myosotis ou des alouettes. Variations sur le même thème pour déclinaison aisée.
Évocations précises, avec êtres vivants.
Les nouveaux lotissements portent des noms de rues qui ne nous rajeunissent pas, je trouve…
Les êtres vivants sont si rares dans ces lieux que je les cherche pour me raccrocher un peu là où le regard glisse sur les façades alignées. Identiques ou presque. Oui nouveaux lotissements, noms des années 30-40, comme si cela pouvait les patiner. Et puis, ça donne bonne conscience.
Magnifique précision des choses aperçues, c’est très parlant, tu nous transportes complètement dans ces rues étranges.
Merci. Je ne fais que décrire. Et je trouve la symétrie, les angles, l’absence de vie glaçantes.