La très longue file des camions, camionnettes, voitures et autres remorques ou bétaillères ayant quelque chose à déclarer commence bien avant le bâtiment des douanes. Ils attendent. Midi, les bureaux des transitaires sont fermés, les bureaux des taxes aux frontières sont fermés, les formulaires, petites cases et autres factures en triple exemplaires font la pause déjeuner. Pas non plus de casquettes, képis, uniformes ou armes à la ceinture. Ceux qui ont juste leur passeport à présenter au cas où, remontent cette ville-file éphémère à petite vitesse, une scène après l’autre. Sandwich grignoté d’un regard vide au volant la portière ouverte, paquet bruissant et sourire béat devant la vidéo du téléphone portable, regard dans le vague et oreilles reliées par un lourd casque qui isole de l’extérieur et immerge dans la musique intérieure, suite de la discussion tranquille commencée il y a bien des années de ceux qui partagent machinalement les provisions étalées sur un large torchon à carreaux posé entre eux, corps semi allongé et endormi sur les eux sièges avant de la fourgonnette, magazine ouvert sur le volant et feuilleté d’un index régulièrement humidifié par une salive distraite, discussion téléphonique plus ou moins animée, mais surtout tablettes, téléphones portables, ordinateurs portables et écrans de toutes tailles, la plupart avec casques, écouteurs, oreillettes pour s’isoler de la foule des voisins : postures identiques mais contenus différents qui se reflètent sur le visage du spectateur concentré, inquiet, amusé. Captif. Sur la file des « rien à déclarer », un ralentissement, une vitre baissée ? On se penche pour voir. 13h, la vie reprend. Vos papiers s’il vous plait !
J’adore les ambiances frontalières.
Moi aussi : tout ce qui bascule, les moments de passage, il y a toujours beaucoup à y trouver