Tu ne vois que ce que tu rencontres disait Perec. Le soleil levant apprivoise le regard de sa lumière progressive, dans la forêt des pies s’envolent le pied trébuche sur une roche cachée sous les feuillages amoncelés, l’œil y perçoit un profil de femme sans âge une mousse recouvre la joue, le nez est bien droit le front haut et plat, des feuilles posées au-dessus du front auréolent le visage d’une chevelure dense et colorée de plusieurs nuances de beige-gris et roux les lèvres sont figées d’un silence éternel, une odeur de feuilles mortes monte au nez et persiste longtemps même après l’éloignement de la forêt de hêtres de chênes et de pins par un sentier entouré de haies de buis et de fougères, des roches dolomitiques aux formes humaines gardiennes du lieu accueillent ou repoussent, la falaise est à leurs pieds, un horizon de bleus singuliers précédé de deux monts, des chemins tels des serpents parcourent les versants aucune habitation n’est visible aucune trace humaine, au-delà, des monts se succèdent en lignes parallèles à des altitudes différentes, des couleurs bleu de Prusse bleu cyan s’y déploient avec subtilité, tout au fond les reliefs se confondent avec le ciel, un halo les enveloppe tel un manteau de mémoire tissé de fils subtils engendrés par la vibration des contemplations portées tout au long des siècles, le vertige s’empare du regard le happe et ne le rend pas, l’univers clos s’est ouvert sur un panorama vertigineux, confusion du ciel et de la terre confusion des ciels et des terres ciel des nuages et ciel des étoiles terre des forêts et terre de la planète, œil aspiré métamorphosé dissous.