Le petit bâtiment de la gare a été conservé, il fut construit par les Chemin de fer de l’Est de Lyon à la fin du 19e siècle, la ligne devait rejoindre Chambéry en traversant par un tunnel la Dent du Chat, elle n’arriva jamais jusque là. C’est maintenant une station de tramway, une piste cyclable longe ses rails jusqu’au Carré de soie. J’en viens sous la bruine et j’arrive ici pour réparer des vélos en libre service sur leur station.
À peine le temps de descendre de mon attelage qu’une dame âgée s’approche, ébahie par ma remorque. Elle la regarde, amusée. Elle me glisse qu’elle montait sur une remorque à vélo quand elle était petite ; avec les patates, ici, au même endroit, ça lui rappelle des souvenirs, c’est son grand-père qui l’utilisait. Il y avait encore des champs, au milieu de maisons.
Je regarde alentour, je fixe le sol avec ses dalles carrées, j’examine la gare construite avec des briques orange clair, coiffée d’un toit de tuiles rouges, deux niveaux, entourés de deux ailes plus petites, je scrute le regard de cette femme, ce qu’elle se remémore avec ses yeux de petite fille. Je pense aux terrains industriels en friche qui bordent la piste cyclable, ils ouvrent à la vue des espaces dégagés par rapport aux zones plus denses d’habitation, peut-être ici autrefois les champs aussi.
Le sol est humide, elle s’assoit derrière la petite récolte, à laquelle elle a participé. Elle a les mains terreuses, elle observe les fumées de cheminées. Son grand-père s’élance, elle rit, l’encourage, les trépidations l’amusent, elle se tient aux rebords au fil des cahots du temps.