De Crasse Tignasse, du docteur H Hoffman, tout ce qu’on ne doit surtout pas faire avec les châtiments les plus effrayants, l’enfant étourdi qui tombe à l’eau, celui qui s’envole au vent, les petites filles qui jouent avec les allumettes, et le pouce coupé avec une paire de ciseaux.
Des Contes de Grimm, l’inconscient qui gouverne les actes, la traversée du monde magique où la parole, les objets les animaux sont dotés de pouvoir, la réversibilité à l’infini des sentiers qu’ils tracent.
Du Grand Meaulnes, la vie qui commence avec l’arrivée du nouveau, l’endroit trouvé parce qu’on s’est perdu qu’on ne retrouve plus, les sauts dans le récit et l’impression profonde de ce texte d’abord transmis par les dictées.
Des Frères Karamazov, les trajets d’Aliocha toujours détournés de son objectif premier, la folie d’une famille, la montée du drame, le drame, le procès, la multitude des récits à l’intérieur du roman, avec la vie des enfants parallèle à celle des adultes.
Du Maître de Ballantrae de Stevenson, l’art de mener le récit avec une économie d’effet romanesque, le domaine partagé à pile ou face, le duel des deux frères ennemies à la lumière d’une bougie, leurs poursuites inlassables dans la forêt du Grand Nord, ou dans un New York en train de se construire, raconté par un narrateur qui désapprouve le Maître tout en étant fasciné par son éclat.
De Perceval le Gallois, aborder le monde avec un regard d’idiot ou d’innocent.
De la Recherche du temps perdu, prélever des moments, les disséquer, prendre le temps pour aller au fond, autour, en rosace, aborder le monde sans préjugé, promener un regard lucide sur chacun, attraper les tics de parole des personnages, se perdre à l’infini dans ce laboratoire d’analyse de sensations, de sentiments, de réflexion, de lieux, de personnages qui sont si proches, se promener dans une cathédrale. une écriture transversale.
De la Promenade au phare, la construction du livre comme une pièce musicale ou une peinture : l’ouverture avec Madame Ramsay qui semble orchestrer la vie et la peintre qui place les couleurs les tensions de lumière, le fond sur la toile, l’interlude où ne reste que la maison abandonnée aux éléments, le monde d’après avec le bateau qui s’approche du phare et la peinture qui trouve son équilibre. Une écriture poétique.
De la Tempête, parce que je n’y comprends pas grand chose, un rocher qu’on veut escalader, des flashs, le bouleversement du monde après un naufrage, les forces qui ne peuvent être enfermées malgré une éducation d’ignorance, le monstre qui veut briser ses chaines, les maitres, les serviteurs, les clowns , l’ivresse, l’esprit arrangeur et le monde magique.
Premier amour, ma porte d’entrée pour rentrer dans l’univers de Beckett, l’art du contre sens, le personnage perturbé par les éléments et les autres, toujours poussé ailleurs, balloté par les autres comme un danseur qui glisse, tombe, franchit la limite, recule, découvre une dimension inexplorée.
Merci pour cette sentimenthèque qui ouvre les fenêtres en grand sur le monde… Je partage avec vous « Le grand Meaulnes » et pour moi, ce sera aussi l’aura de mystère qui nous enveloppe tout au long du texte. Je suis passée par toutes le couleurs de l’arc-en-ciel avec Raskolikov dans « Crime et châtiment » mais pourrais bien avoir envie d’entrer dans le cercle infernal des frères Karamazov. Une pépite pour la fin : si le personnage de Perceval vous envoûte, je vous invite à lire le texte que Christian Bobin lui consacre dans « Une petite robe de fête » : un pur moment de poésie, magnifique !
Merci pour la piste de lecture sur Perceval. et excusez moi pour ma réponse tardive mais j’ai du mal à me repérer sur le site.