( je suis tombée sous le charme de cette enseigne en néon rouge au cours d’une nuit sans fin, entrainée par deux amis qui fréquentaient la boîte régulièrement et connaissaient autant les videurs, les barmaids et les barmans que les DJ, sans oublier à l’étage, dans un recoin un peu secret, les dealers d’ecstasy — mes deux amis y étaient comme chez eux. A l’issue d’un diner festif où l’alcool donne envie de faire n’importe quoi, ils avaient embarqué tout le monde: aux Folies ! Et quelle merveille, je me souviens d’avoir immédiatement adoré ce lieu interlope, à commencer donc par l’enseigne en néon rouge de la façade. Dans un carré de lumière dessiné on lisait tout simplement « Paris by night », sobre et exacte définition de ce qu’on allait trouver à l’intérieur, l’un des deux visages de cette ville sagement classique le jour, follement baroque la nuit. La déco rappelait celle d’un théâtre, dans une version crasseuse et déglinguée, un théâtre dont la scène était le dancefloor, peuplée de personnes déclinant tous les genres possibles, trans, inter, et toutes les origines, des montagnes alpines (moi) aux montagnes andines (un garçon avec qui j’avais dansé), enfin, dans mon souvenir. De temps à autres, pour se reposer, d’acteur on devenait spectateur mais il fallait se frayer une petite place entre les couples, les trios ou plus, s’embrassant, affalés sur les banquettes de cuir rouge — car oui, tout y était rouge, un rouge tamisé, un rouge de la nuit, rouge et noir en somme, signe de passions extrêmes. Aucune autre boite de nuit ne m’avait causé cette impression de refuge romantique pour tout.e.s ceux.elles qui veulent vivre leur vie en accord avec eux.elles-mêmes. Bien sûr j’idéalise, je savais qu’il n’y a pas tant de drogues en circulation dans un établissement réglo, mais quelle importance? En dansait jusqu’au matin, on était persuadé d’être le coeur de Paris transfigurée par le « by night » de l’enseigne, transporté dans les nuits légendaires de nos héros, celles des pochettes de disques de Lou Reed, des slideshow de Nan Goldin, des noms mythiques. Folies Pigalle – Paris by night – discothèque, tout était dit dans ces quelques lettres de néon rouge désignant ce lieu qu’on voyait devenir plus pale dans la lumière du jour quand en on sortait. ) En cherchant quelques infos sur ce qu’il est devenu, car je ne suis plus retournée Place Pigalle, de surcroit by night depuis longtemps, je suis tombée sur des sites de recommandations de sorties, dont les avis sont plus négatifs les uns que les autres. Je n’en cite qu’un représentatif de l’ensemble: « Aurélie. Novembre 2019. Avis: 1/5. HORRIBLE. Pas mon habitude de laisser des commentaires mais ne rien dire c’est comme approuver la déchéance et le non-respect de cet établissement de dépravés. Dans le sens dépravés j’entends : des videurs complètement désagréable et imbéciles comme leurs pieds, meilleur plan de parler à un mur ou un clodo complètement torché, notre pote s est fait volé sa carte bleue ainsi que le code donc action préméditée; apparemment c est pas la première fois, pour le coup j’accuse le staff soit d’être coupable ou d’encourager ce geste, la clientèle : des vieux qui te harcèlent et agressives, la musique horrible , endroits sale et malaisant. Si t’as envie d’un after à 7h du mat et que tu trouves rien d’autre, t’as meilleure affaire de soit rentrer ou finir en appart avec tes potes. Fuyons ce trou a rats idnamissible et malsain et je pèse mes mots ! Le pire after de toute ma vie même en ayant fait les pires squats malaisants à l’autre bout du monde. ». Ce lieu, je l’ai aimé quand j’avais vingt ans.