— Lo sé porque te has ido. Yo también me fui.
— Elle a neuf ans quand ils frappent à la porte. Vienen por ti, crie sa mère. Le baluchon est prêt, elle les suit. Quitter sa mère, quand on est si petite —
— Porque me fui.
— J’avais neuf ans aussi sur le tarmac, expatriée comme toi et comme toi, je n’ai pas regardé en arrière, pas une fois.
— Yo no hablaba francés, pero tú, sí.
— Un voyage en bateau (elle n’est pas la bonne, elle reste près d’eux, dort avec eux, dans la belle cabine), sur le pont, c’est son tablier qui la différencie des enfants qu’elle garde —
— Me trataba bien, amaba a sus hijos.
— La plus jeune au berceau, l’aîné n’a pas encore six ans. Juliana s’en occupe vaillamment, une petite mère, encore dans l’enfance – Le tablier désigne son état, personne ne l’approche, même les hommes ont pitié, même les pires la craignent —
— Ladro como un perro, araño como un gato.
— Elle nourrit les petits, les soignent de la houle, elle-même est malade (première fois sur la mer), personne ne le sait —
— No puedes comprender.
— Tu me l’expliqueras.
— Ses patrons s’installent à Alger. Développer leur fortune, revenir à Saragosse quelques années plus tard, ils ont le temps — Sa mère l’a vendue, un petit bénéfice, un grand espoir, non pas qu’elle revienne, qu’elle soit heureuse là-bas, dans cet eldorado, meilleure vie qu’à Ricla. Sa mère est certaine que son enfant, sa fille, mangera à sa faim, là-bas. Ils lui ont assuré qu’ils la traiteraient bien, elle les croit, puisqu’ils sont riches. Et qu’elle n’a pas le choix. Elle prie la Virgen del Pilar, qui l’exauce –
— — Los campos de Castilla me recordarán.
— A treize ans, elle les quitte et se met en ménage, avec un plus vieux qu’elle — mon grand-père — il a l’âge de son patron —
Merci pour votre texte et le mélange des langues.
Merci pour votre lecture hors du cycle en cours, vraiment merci.