Fragment de départ #8 https://www.tierslivre.net/ateliers/8-nos-27-septembre/
— Ce rêve très clair à la mémoire, sans doute au petit matin, sinon on ne les retient jamais. Toujours trouvé pénible d’écouter raconter un rêve. Pour soi, cette perte de contrôle inquiète et la netteté de celui-ci ajoute au trouble. On est dans la dernière salle d’une exposition de peintures contemporaines. Grande pièce en béton. Œuvres non figuratives, rayonnantes de couleurs vives mais sombres aussi. Nous achevons notre visite. Je suis en compagnie d’une femme à la chevelure brune, haute, hirsute mais très travaillée. Elle me dit : « tout ce que tu ne peux pas avoir, photographie-le ! ». Je me dirige alors vers une autre femme brune vêtue d’une longue robe moulante vert anglais. Cheveux noirs et lunettes. Nous nous enlaçons. Réveil.
il écrit pour étirer et dilater ce bout de rêve avec cette femme brune. Moulée dans une longue robe de velours vert anglais. De longs cheveux très noirs. Pourtant jamais aimé danser mais, le toucher contre du velours. Et elle, de derrière ses grandes lunettes à monture écaille, certain qu’elle voit tout en lui, sa joie d’être contre, sa maladresse, sa peur de tomber, de tout briser, que ça continue toujours comme ça, contre. Peut-être même la fin du rêve, elle la voit. Mais elle ne dit rien et reste contre. Dans leur rêve, enlacés sans fin, l’un l’autre contre. Impression de scène cliché tant vue, trop lue. Seuls, contre, dans ce parking silo béton au sol enduit de cette peinture pour faciliter le glissement des pneus et les manœuvres des autos. Parking vide de toute voiture où flotte l’odeur et la clarté du neuf. On tourne autour d’eux pendant qu’ils tournent ensemble, les frôler juste. Lumière froide et très vive, crue, tombe des bandes de néons. On entend pas la musique. Leurs voltes ne permettent même pas d’identifier un style, un rythme. Peut-être que chacun l’a dans sa tête, la musique. On ne les dérange pas ou plutôt, ils nous tolèrent dans leur rêve. En sortir pour l’écrire mais eux toujours à danser contre. Elle leur tourne pas la tête ? Ils sont pas douloureux les pieds ? Pas trop chaud à rester collés contre ? Combien il va durer leur manège de bonheur ? Il sait qui est il mais, elle ? Il ne la connaît, reconnaît pas. Préférer ne pas savoir pourquoi elle, pourquoi là, pourquoi la robe longue vert anglais, les grosses lunettes et cette coiffure sombre. Épaule bien dégagée où sa tête à lui posée contre, en rêve. Les voir juste contre, les regarder dans leur sorte de danse abandonnée, l’un contre, l’autre contre, tout contre. Visages sereins, calmes, contre. Les yeux fermés à tourner, on craint la chute mais eux continuent entre les piliers du parking. Ce rêve, il s’en est souvenu par, au matin, cette force à ne pas vouloir en sortir. À lutter contre l’arrachement à la nuit. Pourtant il se déchire le rêve. Vite en écrire quelques bribes pour revenir plus tard en mots au souvenir. Jamais repris un rêve là d’où le petit matin a arraché. Pas comme un train. Se dire que son corps, avec elle contre, continue de tourner dans leur parking silo même si jamais ne pourra les rejoindre qu’en mots, ne pourra jamais le réintégrer ce corps dans ce rêve. Tout au bout des mots, espéré quand même prémonition et que peut-être la rencontrer cette femme à la tignasse corbeau, et peut-être, la vivront, un jour, une nuit, la longue danse sans fin dans le parking silo neuf contre, contre
En quelque sorte, une contre-danse.
Merci pour la lecture Marie :))