Le fermier raconte les hivers norvégiens sous la neige isolé près de ce col. Nous marchons près des ruches qui s’éveillent à la lande. Je suis surpris à vrai dire de voir des abeilles ici. S’il les nourrit assez, elles parviennent lorsqu’il gèle à pierre fendre à maintenir une température positive élevée toutes regroupées en grappe au cœur de la ruche. Il raconte qu’il fut médecin auparavant, il a beaucoup voyagé en missions humanitaires, en Inde particulièrement. Je suis à sa table maintenant, buvant un café. Je lui prends du miel et des œufs de caille. Il raconte qu’un roi anglais ne mangeaient que ceux là pour rester en bonne santé.
Je suis mon hôte salvateur sur une pente d’herbe qui mène à une maison en ruine aménagée en cabane. Sous un chêne, à côté d’une succession de réservoir d’eau, se trouve le futur emplacement qu’il me proposera pour ma tente. Plus haut, l’entrée du cabanon, un jardin potager, et de l’autre côté un verger d’arbres fruitiers. Pour répondre à une de ses question, je cherche un mot précis dans un petit livre de poche acheté pour subvenir à mes souvenirs défaillant de la langue allemande ; je ne le trouve pas. Il le regarde à son tour, on en rigole, on ne peut pas discuter avec ça, ce ne sont que des formules de consommateurs (taxi, métro, prix etc…). Suit un curieux geste où il place le livre dans une de ses poches de salopette. Sous-entendu nous allons discuter à mains nues. Pas complètement, un stylo et un petit bout de papier nous serviront pour les chronologies et dates. Maudissant les guerres, les dictatures et les dictateurs, le fermier en salopette bleue raconte. Enfant en Yougoslavie après la seconde guerre mondiale, il ne pouvait pas parler sa langue maternelle, l’allemand, en public. Les terres de sa famille avaient été expropriées. Il a pu émigrer en Allemagne sur des terres accordées par l’état ouest allemand naissant. Depuis il avait cultivé ce lopin d’un hectare. Il m’emmène avec une brouette un peu de foin pour rendre le sol plus confortable, me montre des citernes d’eau si j’en ai besoin.
Elle raconte qu’il a plu pendant quarante jours à la suite, c’est une histoire d’eau et de brume, sans ciel bleu, sans silence, toujours enveloppée par les gouttes s’abattant sur la mer et la ville.