La cafetière éthiopienne ne peut, seule tenir debout. Posée sur un anneau de matière végétale entortillée, tressée, épousant parfaitement l’arrondi brûlant de son fond pansu.
Usage de cafetière, ainsi désignée quand l’européen dirait cruche ou carafe (le long col), le bouchon (de bois prolongé d’un fin et court manche), cherchant, en vain, l’élément filtrant dont le nectar obtenu par longue décoction, s’éclaircit par gravité au fond de la tasse.
La couleur appelle un commentaire prudent, l’objet africain, couleur d’Afrique centrale, aussi café, d’un noir profond, renvoie telle une surface polie les traits de lumière incidente, laissant traces de brillant, bleu, rouge.
Matière pourrait être métal, fonte de fer, vieux bronze, mais objet terrien, terrestre, argile cuite et recuite, capable de supporter son réchauffement violent sur un fourneau de braises incandescentes, portant au moins trois fois à ébullition le mélange au goût sauvage.
Décrire cette forme, la tentative ci-dessus dans des termes familiers propres aux contenants ne saurait épuiser le vocabulaire, partant de la panse quasi sphérique, disons qu’elle est surmontée d’un col peu évasé bouchable, d’un bec oblique, d’une anse reliant panse et col, se bouclant sur un vide ovoïde.
Androgyne au fondement voluptueux, appelant la caresse, croupe généreuse, mais androgyne en raison de ce bec phallique en érection que l’anse-bras posé sur la hanche exhibe tel un défi.
Ethiopienne qualifiée de femme parmi les plus belles au monde, créatrice d’un objet à son image, Ethiopien rêvant de la femme idéale qu’il modèle dans l’argile, accouplés dans une forme matricielle, générant d’une graine grillée, broyée, ivre de vapeur, le suc noir de leur terre rouge.