# anthologie 05 # Avec Judith Wiart | Parler avec les adolescent.e.s

J‘ai de mes ancêtres gaulois l’oeil bleu blanc, la cervelle étroite, et la maladresse dans la lutte. Je trouve mon habillement assez barbare que le leur. Mais je ne beurre pas ma chevelure.
Les Gaulois étaient des écorcheurs de bêtes, les brûleurs d’herbes les plus ineptes de leur temps.
D’eux, j’ai : l’idolâtrie et l’amour du sacrilège; – oh ! tous les vices, colère, luxure, – magnifique la luxure; – surtout mensonge et paresse.
J’ai horreur de tous les métiers. Maîtres et ouvriers, tous paysans, ignobles. La main à plume vaut la main à charrue. – Quel siècle à mains ! – Je n’aurai jamais ma main. Après la domesticité mène trop loin. L’honnêteté de la mendicité me navre. Les criminels dégoûtent comme des châtrés : moi, je suis intact et ça m’est égal.

RIMBAUD VAGABOND – cHOIX DE TEXTES ET POSFACE DE BRUNO DOUCEY
  • ça se voit que vous avez été élevée dans du coton , Madame !

  • La psychiatre élégante regarde l’adolescente dans les yeux, incline la tête, sa mimique des lèvres montre qu’elle va lui répondre le plus doucement possible. Pas du tac au tac. L’ado. avait assené son constat sur un ton plutôt las et presque tendre, elle avait détourné aussitôt son propre regard pour lorgner en direction de la porte fermée. Elle ne s’est pas levée. C’est déjà çà…
  • Vous avez raison… mais on peut en parler si vous voulez. Je suis là pour vous écouter.
    Dans un entretien d’hôpital psy. l’asymétrie adulte / ado est plus criante qu’à l’extérieur. En primo-admission, les jeunes patient.e.s ne viennent jamais de leur plein gré dans un lieu de privation de liberté ( vécue comme telle, même si leur admission nécessite un minimum d’adhésion, on y veille). Autant dire que les premiers moments de confrontation sont confus et anxiogènes. Impression pour les soignant.e.s à chaque hospitalisation d’ouvrir une nouvelle boîte de Pandore. Le risque de décrochage scolaire ou pire de passage à l’acte suicidaire chez les ados dramatise la situation. « Un coup de tonnerre dans un ciel (supposé) serein ». Crise délirante, troubles du comportement, ou dépression inquiétante, chaque ado. semble avoir pris feu et trimballe en porte-drapeau involontaire toute la souffrance familiale générée par sa décompensation psychique. A la manière des grands brûlés, il s’agit d’approcher l’ado. sans l’affoler davantage, il n’y a aucune ruse à avoir, seulement de l’expérience et de la patience d’ailleurs, l’équipe infirmière ou éducative autour, est là pour rassurer, soutenir, accompagner et guider vers une vie moins douloureuse et constructive. Cela s’apparente parfois à du sauvetage en haute-mer.

A propos de Marie-Thérèse Peyrin

L'entame des jours, est un chantier d'écriture que je mène depuis de nombreuses années. Je n'avais au départ aucune idée préconçue de la forme littéraire que je souhaitais lui donner : poésie ou prose, journal, récit ou roman... Je me suis mise à écrire au fil des mois sur plusieurs supports numériques ou papier. J'ai inclus, dans mes travaux la mise en place du blog de La Cause des Causeuses dès 2007, mais j'ai fréquenté internet et ses premiers forums de discussion en ligne dès fin 2004. J'avais l'intuition que le numérique et l 'écriture sur clavier allaient m'encourager à perfectionner ma pratique et m'ouvrir à des rencontres décisives. Je n'ai pas été déçue, et si je suis plus sélective avec les années, je garde le goût des découvertes inattendues et des promesses qu'elles recèlent encore. J'ai commencé à écrire alors que j'exerçais encore mon activité professionnelle à l'hôpital psy. dans une fonction d'encadrement infirmier, qui me pesait mais me passionnait autant que la lecture et la fréquentation d'oeuvres dont celle de Charles JULIET qui a sans doute déterminé le déclic de ma persévérance. Persévérance sans ambition aucune, mon sentiment étant qu'il ne faut pas "vouloir", le "vouloir pour pouvoir"... Ecrire pour se faire une place au soleil ou sous les projecteurs n'est pas mon propos. J'ai l'humilité d'affirmer que ne pas consacrer tout son temps à l'écriture, et seulement au moment de la retraite, est la marque d'une trajectoire d'écrivain.e ou de poète(sse) passablement tronquée. Je ne regrette rien. Ecrire est un métier, un "artisanat" disent certains, et j'aime observer autour de moi ceux et celles qui s'y consacrent, même à retardement. Ecrire c'est libérer du sentiment et des pensées embusqués, c'est permettre au corps de trouver ses mots et sa voix singulière. On ne le fait pas uniquement pour soi, on laisse venir les autres pour donner la réplique, à la manière des tremblements de "taire"... Soulever l'écorce ne me fait pas peur dans ce contexte. Ecrire ,c'est chercher comment le faire encore mieux... L'entame des jours, c'est le sentiment profond que ce qui est entamé ne peut pas être recommencé, il faut aller au bout du festin avec gourmandise et modération. Savourer le jour présent est un vieil adage, et il n'est pas sans fondement.