
J‘ai de mes ancêtres gaulois l’oeil bleu blanc, la cervelle étroite, et la maladresse dans la lutte. Je trouve mon habillement assez barbare que le leur. Mais je ne beurre pas ma chevelure.
RIMBAUD VAGABOND – cHOIX DE TEXTES ET POSFACE DE BRUNO DOUCEY
Les Gaulois étaient des écorcheurs de bêtes, les brûleurs d’herbes les plus ineptes de leur temps.
D’eux, j’ai : l’idolâtrie et l’amour du sacrilège; – oh ! tous les vices, colère, luxure, – magnifique la luxure; – surtout mensonge et paresse.
J’ai horreur de tous les métiers. Maîtres et ouvriers, tous paysans, ignobles. La main à plume vaut la main à charrue. – Quel siècle à mains ! – Je n’aurai jamais ma main. Après la domesticité mène trop loin. L’honnêteté de la mendicité me navre. Les criminels dégoûtent comme des châtrés : moi, je suis intact et ça m’est égal.
- ça se voit que vous avez été élevée dans du coton , Madame !
- …
La psychiatre élégante regarde l’adolescente dans les yeux, incline la tête, sa mimique des lèvres montre qu’elle va lui répondre le plus doucement possible. Pas du tac au tac. L’ado. avait assené son constat sur un ton plutôt las et presque tendre, elle avait détourné aussitôt son propre regard pour lorgner en direction de la porte fermée. Elle ne s’est pas levée. C’est déjà çà… - Vous avez raison… mais on peut en parler si vous voulez. Je suis là pour vous écouter.
Dans un entretien d’hôpital psy. l’asymétrie adulte / ado est plus criante qu’à l’extérieur. En primo-admission, les jeunes patient.e.s ne viennent jamais de leur plein gré dans un lieu de privation de liberté ( vécue comme telle, même si leur admission nécessite un minimum d’adhésion, on y veille). Autant dire que les premiers moments de confrontation sont confus et anxiogènes. Impression pour les soignant.e.s à chaque hospitalisation d’ouvrir une nouvelle boîte de Pandore. Le risque de décrochage scolaire ou pire de passage à l’acte suicidaire chez les ados dramatise la situation. « Un coup de tonnerre dans un ciel (supposé) serein ». Crise délirante, troubles du comportement, ou dépression inquiétante, chaque ado. semble avoir pris feu et trimballe en porte-drapeau involontaire toute la souffrance familiale générée par sa décompensation psychique. A la manière des grands brûlés, il s’agit d’approcher l’ado. sans l’affoler davantage, il n’y a aucune ruse à avoir, seulement de l’expérience et de la patience d’ailleurs, l’équipe infirmière ou éducative autour, est là pour rassurer, soutenir, accompagner et guider vers une vie moins douloureuse et constructive. Cela s’apparente parfois à du sauvetage en haute-mer.