#01 LVMD, en ce jour et à cette heure | 8h00 du matin

Rez-de-chaussée : un grand local commercial fermé.

1er étage droite
La femme âgée est réveillée depuis longtemps. Elle reste au chaud dans son lit. Elle a entendu les bruits de chasse d’eau, de douche. Quelques portes se sont ouvertes puis refermées. Dans la rue, le bruit des klaxons se fait plus pressant. La circulation est déjà saturée sur le boulevard. Dans ses mains parcheminées, une vieille photographie noir et blanc datant du temps du bonheur et des joies simples. D’une vie avant la vie et ses obligations. Ces derniers temps, la photo prend davantage de place, ses souvenirs remontent si nombreux. Parfois, elle ne les reconnaît pas et se demande si c’est bien elle qu’elle voit si heureuse.

1er étage gauche
Un ronflement sonore, entrecoupé de moments d’apnée, vient de la chambre. Un homme dort à poings fermés dans un lit deux places. Il est sur le dos, la bouche ouverte, les yeux clos. Il porte un vieux pyjama. Les volets métalliques sont clos. L’homme a la soixantaine. Dans l’appartement, aucun bruit à part son ronflement sonore. Au-dessus, quelqu’un marche rapidement.

2e étage gauche
La femme s’apprête à sortir. Elle porte des bas couleur chair et des escarpins beige. Elle enfile son manteau, attrape son sac, ouvre la porte. Elle ne sort pas. Dans un soupir d’agacement, elle la referme aussitôt, inspecte la desserte de l’entrée, va-et-vient dans l’appartement à la recherche de ses clés. Ses pas résonnent, elle n’a pas le temps d’ôter ses chaussures. Ses clés sont posées sur la table basse du salon. Elle les saisit sèchement et marche vivement vers l’entrée. La porte claque.

3e étage droit
Dans la cuisine du 3e étage droite donnant sur la cour intérieure de l’immeuble, un couple écoute le flash info de 8h. Elle porte une robe de chambre bleu marine dont le tissu bouloche, lui porte un vieux gilet de laine marron troué au niveau du coude. Ils aiment leurs vieux vêtements, ils sont bien dedans. Ils ne les mettent qu’à la maison. Ils en ont d’autres, mais préfèrent ceux-là. Ces vieilleries ont une âme, une histoire. Elles les ont accompagnées comme elles le font ce matin. Il tranche le pain, la croûte crisse sous le couteau. Elle étale le beurre et trempe la tartine dans le café au lait fumant. Elle mâche en observant un carré de ciel gris.

4e étage droit
Deux enfants courent dans le couloir reliant les différentes pièces de la maison entre elles. Leurs pas résonnent sur le parquet, leurs rires s’échappent malgré la porte fermée. Ils ne veulent pas mettre leur manteau. Ils ne sont pas pressés d’aller à l’école. En chœur, ils chantent une comptine « petit escargot, porte sur son dos, sa maisonnette… » badaboum, la fillette est tombée, son frère, pris par l’élan de leur jeu, saute par-dessus pour éviter de lui marcher dessus. Le bruit est encore plus fort. Les deux enfants rient. La mère arrive exaspérée et les gronde.

5e étage gauche
Un chien tourne et vire dans l’appartement. Il va de la porte d’entrée à la chambre, revient vers le double séjour-salon et repart dans la chambre. Il a le poil noir comme du charbon. Il mue, l’hiver sera là dans quelques semaines. Ses poils s’accumulent dans les coins sous les meubles, là où l’aspirateur ne va pas souvent. Le chien passe devant la porte du bureau fermé à clé. Ses griffes cliquettent sur le parquet. L’homme le rassure, s’habille rapidement. Il sautille sur une jambe en mettant son pantalon. Le chien agite la queue, et couine pour indiquer l’urgence.

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