L’Usine. Oublier l’Entrée Visiteurs, au bout de l’avenue débouchant sur les parkings et le poste de sécurité. Choisir le chemin piéton plus proche de la sortie du RER. Passer un portillon. Une chaîne pend au grillage. Le chemin zigzague au milieu de préfabriqués abandonnés. Ce n’est pas encore l’Usine. Avant, on devait trouver par là des activités périphériques à la fabrication. Une banderole à terre « Atelier Gourmet ». Un Centre de formation. CFCAC. Tout est figé maintenant : des stores couchés derrière les fenêtres ; des bureaux entassés. A mesure qu’on avance, entrer dans le vif de l’Usine. Badger pour passer les tourniquets. Badger sur la lumière bleue. Éviter le voyant rouge. Ce tourniquet-là est cassé et couine toute la journée d’un bip obstiné ; marcher le long des passages vers la gauche en suivant la clôture. Des camions en stationnement ont les phares qui clignotent. Respecter les consignes de sécurité. Saluer une femme qui tond la pelouse entre la clôture et la route. Elle porte des lunettes miroir et mâchonne un brin d’herbe. Je ne l’imagine pas jardinière. Mes aprioris. L’air sent l’herbe coupée. Au rond-point, tourner à droite vers le bâtiment EE2. Il est presque 7 heures. Un merle chante. Scruter la façade pour l’apercevoir perché sur la poutre métallique qui soutient 3 étage. Le matin colore les vitres en or et acier. Sous l’auvent du bâtiment EE2, des tables de piquenique et des voitures de service. Badger. Pousser la porte du Helpdesk couverte de panonceaux. Numéros utiles. Règles de Sécurité. Ça dit : ne pas courir dans les escaliers. S’essouffler rapidement : c’est violent cette montée. Badger au troisième. A droite, le royaume de la secrétaire. Ongles laqués et cheveux corbeau. Elle a des plantes vertes et des fournitures bien rangées. En se détournant de son écran, elle pivote sur son fauteuil et me dit bonjour. A gauche, une machine à café où mijote un jus abominable. Un panonceau. Ça dit : la vaisselle ne va pas se faire toute seule. Devant moi, des bureaux ; un fauteuil. C’est là que je me mets ?
J’aime la répétition de ce verbe où l’on voit tout de suite le geste: badger. Et aussi le « ça dit », cette grande voix sèche des injonctions, des indications. Elle nous accompagne partout.