Sur la place, le métro, le manège, il la tient par la main, une main ferme, celle d’un père qui rassure. Le plateau du manège s’immobilise il la hisse, frêle silhouette sur le grand cheval de bois peint. Lui glisse dans la main des tickets qu’elle tient de ses doigts serrés. Ses yeux le remercient fièrement. Lentement ça se met à tourner. Le manège grogne comme un lion. En cavalière elle se tient à la crinière, tente d’attraper la queue de lapin qui surgit à chaque tour. Son cheval galope maintenant aussi vite que la musique. A chaque tour elle peut s’envoler dans les airs et toucher les étoiles qui filent comme les lumières de la ville. Tout autour les maisons montent et descendent les fenêtres devenues bouches découvrant leurs dents..
Soudain son regard se trouble, ses yeux s’affolent à la recherche de son père, le paysage défile si vite rien ne se distingue. Ses jambes fourmillent de mille peurs, ses mains glacées s’agitent et sa tête devient girouette. Il n’est plus là, et ce tour qui n’en finit pas. Est-ce qu’en tirant la queue du lapin le manège peut s’arrêter de tourner ? Son cœur cogne sa tête. Peur d’être perdue, abandonnée dans ce mauvais rêve, elle veut se sauver pour le retrouver, lui. Elle seule au monde, le manège peut-il l’emporter, où vont les manèges ? Puis ça ralentit, s’immobilise. Elle descend du cheval, hagarde, il est là lui tend la main. Ils repartent calmement traversent la place le manège reprend sa danse.
Étonnant comme les mains sont présentes dans tous nos textes. Du plaisir de tourner à la peur de s’envoler ailleurs, le tour de manège ne vieillit pas il me semble voir les mêmes émotions lorsque j’y emmène mes petites filles, merci de les restituer si bien.
Merci Isabelle, oui les mains, une prolongation du coeur peut-être… et le manège à la fois attirant et intriguant, tout un monde insolite… devrait on en refaire un tour ?
se perdre du regard, de la main, de l’odeur, du gout, cette proposition n’a pas fini d’épuiser les possibilités de se souvenir puis de se défaire de nos appuis sensoriels. Ce texte me parle beaucoup. Un manège place de la Convention, à Paris dans le 15 ème, revisité avec tous émois l’accompagn
tous émois l’accompagnant ( désolé pour le bout de phrase manquant)
oui il suffit de … pour se perdre, ou se croire perdu, des émotions identiques. Merci Patrick pour votre manège qui ne m’est pas inconnu, le mien était place de Ménilmontant dans le 11è
Merci pour ce texte qui dit de façon si juste je trouve le monde de l’enfant : son imagination sur le manège qui métamorphose le décor et la peur de l’abandon ! Extrêmement touchant !
Bonjour Emilie et merci, le monde de l’enfance n’est finalement jamais bien loin, un simple voile nous permet de passer au travers…