Une traversée de Buffalo | bifurcation 1 | service d’immigration

une ville ne se développe qu’à condition de forces neuves


Une bifurcation de 7 figures dans le chantier Buffalo. Accéder au livre Une traversée de Buffalo.

 

On nous avait reproché de publier cette photographie. Pourtant, nous le maintenions encore aujourd’hui : il n’y avait rien de secret dans la ville. Au contraire, pensions-nous, faire comprendre visuellement comment on s’y prenait et quelles étaient les étapes pour l’installation dans la ville était une garantie pour l’équilibre de ce qui s’y développerait, et la façon dont nous allions vivre les uns avec les autres. Nous avions préféré, et cela fonctionnait depuis longtemps comme cela désormais, que la sélection des nouveaux arrivants se fasse dans leur pays, là-bas, en lien avec nos agents et nos services. Et puis on mettait à leur disposition, dans le point d’embarquement le plus proche de leur domicile, la navette adaptée aux usages définis ensemble. Parfois, pour une pleine famille. Souvent pour un individu seul. On avait décidé avec eux, en lien avec nos agents et nos services, ce qu’il leur faudrait pour cette installation. On trouvait tout, ici, dans la ville. Point n’était besoin d’en tant rajouter. Ce serait l’occasion de nouveaux partages, d’apprentissages. Alors ils s’installaient avec leurs affaires et meubles dans les caisses-navettes, et on les amenait. C’était confortable et fonctionnel, protégé. Nul ne s’en plaignait. Bien mieux qu’un Air Transat où vous étiez serrés comme un autobus et vos malles et valises qui suivaient on ne sait quel chemin à on ne sait quelles dates. Vous étiez équipés, nourriture, eau, hygiène, loisirs numériques. Et, dans le compartiment capitonné qui voyageait vers la ville, comme un sas pour laisser en arrière ce qu’on quittait, et recevoir une première initiation à leur nouvelle vie. On ne les garde pas longtemps dans les sas. Les arrivages sont organisés en groupe. Les camions prennent alors les caisses-navettes et on dépose chacun dans la maison qui l’attend – la caisse-navette se greffe au garage, c’est de l’intérieur de leur maison qu’ils découvrent la nouvelle ville. Finies ces arrivées camping, ces périodes de transition entre hôtels et recherches de logement, cette ville qu’on découvre d’un mauvais regard parce qu’on ne sait pas encore l’habiter. C’est pour cela que nous acceptons que soit diffusée la photographie d’un de ces arrivages de nouveaux habitants, au moment où commence la dispersion, alors que tous, familles ou solitaires, attendent encore dans les navettes aveugles.
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responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
diffusion sous licence Creative Commons CC-BY-SA
1ère mise en ligne et dernière modification le 7 février 2013
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