Kenzo | paysages intérieurs

de la maison comme construction intérieure


Comment dire l’importance que semble attacher Kenzo à cette préparation de nos maisons à cuire ?

Kenzo a une compréhension très complexe, immédiate et pointue de ce que nous demandons et proposons. Chaque échange en témoigne.

Les deux heures d’atelier sont pour lui deux heures de travail intense.

Sauf qu’à la fin, et même parfois en cours de route, il y a un gros câlin et qu’on se sentirait soudain devenu grand-père. Mais ça ne triche pas.

Nous avons fait ensemble, Claude, Armelle et moi, une grave erreur la première fois : dans le village que constituent les maisons en cours d’élaboration, nous n’avons pas gardé la maison de Kenzo. Aujourd’hui, dès qu’entré, il est allé la chercher et ne l’a pas trouvée. Nous l’a explicitement demandée. J’ai dévié : je lui ai montré des photos de la première séance, et lui sur ces photos. Cette trace l’a rassuré.

Quand il a commencé à travailler, c’est la maison de la semaine dernière qu’il a recommencée. La maison est une hutte compacte – elle n’a pas pas de fenêtres, ni de portes. Kenzo n’est pas le seul des petits que nous accueillons, il est le seul à installer une maison sans fenêtres ni porte, même dessinée. Mais, la semaine dernière, devant la maison, il y avait un personnage debout (voir ce billet). La capacité de Kenzo à construire et représenter n’est donc pas en cause. D’ailleurs, ce personnage nous l’avons gardé, et il était heureux de le découvrir présent dans le village des maisons en préparation.

Aujourd’hui, Armelle a compliqué le répertoire des outils : il y a un presse-ail, et trois râpes à fromage. On ne malaxe plus la terre, on crée des filaments, qui deviennent eux-mêmes une matière.

Kenzo a consacré son temps à maîtriser les deux types d’outil. Puis à aller chercher la terre et l’installer dans le presse-ail.

Sa tablette de bois, il l’occupe en entier. Quand Kenzo raconte sa maison, nous ne savons pas forcément les mots qui correspondent à chaque élément. Mais le mot maison est présent. Ce qui est important, ce qui est décisif, c’est que Kenzo est capable de nommer et d’identifier la totalité des éléments présents sur sa tablette, même le plus petit. Même la plus petite miette d’argile qu’il a malaxée et disposée, de la taille parfois d’un grain de riz, à un endroit très précis, comme une carte.

Comment cela pourra être lisible dans le village des maisons à cuire ?

Je ne sais pas. Ce que je sais, par contre, c’est qu’à regarder à hauteur de table ce qu’a installé Kenzo, autour de la maison sans porte ni fenêtre, il s’agit vraiment d’une maison, vraiment d’un paysage.

Et je crois que nous trois (et Halia) savons que la rencontre est importante dans les deux sens : pour Kenzo, qui travaille, pour nous, qui apprenons Kenzo, sa densité, son magnifique et si intense regard, et tout son paysage intérieur.


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 22 mars 2012
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