eBouquin | le WEBOBJET, dissection avec vidéo

le WEBOBJET d’Alain François soumis au regard critique du site eBouquin


Immense merci à Clément Monjou, du site ebouquin.fr de s’être emparé du WEBOBJET mise en ligne cette semaine sur publie.net, et qui représente pour nous une nouvelle étape.

Au départ, un site web sans lien, dans la grande nuit du web, et qui sert d’atelier (partiellement) secret pour un an d’un journal d’artiste.

Comment proposer cette nébuleuse dans le cadre de la lecture dense sur l’iPad ?

Notre spécialiste de l’epub, Gwen Català (studio Etoitufaiskoi) a travaillé directement avec l’auteur, pour une réalisation incluant bien sûr les différents niveaux de textes, des liens extérieurs, comme des fichiers sons, des diaporamas, des vidéos.

Clément Monjou non seulement revient avec Alain François sur la démarche de création du WEBOBJET, mais en propose une démo vidéo.

Je reprends ci-dessous l’entretien sans liens, sans images, sans les commentaires et l’intro de Clément, pour cela vous irez sur eBouquin : Portrait : Alain François, du blog au web-objet

Merci renouvelé à Gwen, Alain, Clément. On est sur la bonne route. On y marche ensemble.

De nouvelles tentatives vont ponctuer le chemin de publie.net : ce 27 juin, le n° 7 de la revue D’Ici Là, dirigée par Pierre Ménard, et un travail vidéo-musique-fiction avec Jean-Jacques Birgé... Nous commençons à définir notre territoire, et il inclut de plus en plus de vertige.

FB

Photographie ci-dessus : Alain François, photographié par Philippe De Jonckheere.

 

 

du blog au web-objet, entretien Clément Monjou / Alain François


J’aimerais commencer par la genèse de WebObjet : initialement un blog (texte enrichi par divers contenus audio et visuels), qu’est-ce que ce nouveau support a apporté à votre récit et votre façon d’écrire ?
En réalité, il y aurait plusieurs façons de raconter la genèse de cet « epub ». Je vais devoir choisir un angle, et c’est un crève-cœur. Mais je suppose que vous n’avez pas la place de loger un roman dans cet interview, je vais donc tenter d’être raisonnable…
Je vais donc faire l’impasse sur mes fantasmes d’enfant à propos du livre, puisque le livre est mon seul pays, et plutôt parler du Web. En fait, les choses ont été une sorte d’initiation lente à une nouvelle esthétique : celle du récit numérique. En effet, même si j’ai monté mon premier site en mars 1999, enthousiasmé par le réseau, je suis resté quelques années imprégné de codes esthétiques prénumériques. Mes premières rencontres avec le numérique avaient d’ailleurs été très frustrantes. C’est le Web qui m’a accroché. Je me fous du fantasme de l’altérité numérique. Par contre, l’interface homme/homme, le réseau, et surtout ce réseau qui se met brusquement à tout porter, texte, image, son, partout, ou potentiellement partout a été la grande révélation de ma vie. Ensuite, j’ai eu besoin du regard d’autres, des amis, qui m’ont montré ce qu’il y avait à voir.
Le premier fut Étienne Barthomeuf, de la Pink Pig Page qui le premier, avant l’an 2000, m’a dit qu’il fallait utiliser le réseau comme un médium à part entière, et non comme un bête support pour des œuvres « physique ». Mais j’ai mis quelques années à comprendre vraiment ce qu’on pouvait en faire (à part publier, bien sûr !). J’ai eu alors un premier projet « global », hors mes sites internet, qui devaient se nommer « dialogue du fou ». Ce dialogue schizophrénique n’a jamais mené nulle part. Ensuite, il y a eu la découverte du site de Philippe De Jonckheere, Desordre, qui est une œuvre majeure du Web mondial, je parle de la découverte de son intimité, c’est à dire de son esthétique propre, de l’esthétique de ses mécanismes internes, qui a été un autre choc.
Et puisque nous étions quelques-uns, du Web francophone, à nous côtoyer et à discuter, j’ai compris à un moment qu’il fallait que je m’arrête et que je mette en forme, théoriquement, ce que j’avais vu, vécu, et que je n’entendais pas, ou peu ailleurs.
C’est là que le « vieux projet » d’objet web global a ressurgi. Je crois que j’ai fait une synthèse de mon environnement immédiat, des bdistes égotiques, de mon besoin irrépressible d’écrire, et ma culture de l’image et de ma vie, pour concevoir un site monstre, qui serait composé de « grandes pages HTML », qui contiendraient de gros corpus de texte, d’images et de structure HTML à l’image de cette page unique qu’on trouvait déjà avant 2000 présentant l’intégralité de la Comédie humaine… Vous parlez de blog, mais c’était une manière de pied de nez au dispositif du blog, qui enterre les archives, et nie la chronologie. Je voulais retrouver la chronologie, la fluidité de lecture, et même, puisqu’on pouvait choisir le formatage « rotulus » ou « codex », interroger l’influence de du formatage sur la lecture, déjà.
Voilà comment est né Webobjet1, à l’occasion d’une année de M2 « Arts numériques ».
Pendant cette année et parallèlement à la tenue du journal qui est réédité aujourd’hui, j’ai donc écrit un mémoire sur « l’esthétique du lien numérique ». J’y comparais les dispositifs potentiellement « expressifs » du Web à ceux du livre, pour aller vite. Et le « livre » actuel est né de ça, car dans ce mémoire, je me suis trompé. En effet, alors que les tablettes existaient déjà, très ingrates, je n’ai pas vu arriver le succès technique et commercial de l’Ipad, et le changement de paradigme qu’il impose. En effet, cet objet qui semble postmoderne, qui impose des contraintes que le Web n’avait pas, est pourtant une avancée incroyable, une disparition de la souris, par exemple et donc d’un intermédiaire dans ce jeu à l’interface qu’on vit depuis l’avènement de la micro-informatique. Sans parler de la maniabilité, de la légèreté (pas encore idéal) et du fait que ça ne chauffe pas ! J’ai redécouvert mes livres numériques, et surtout ceux qui ne passaient pas sur ma tablette Samsung très limitée. En tant qu’écumeur de Gallica depuis sa création, par exemple, c’est l’objet que j’attendais depuis plus de dix ans !

 

Quel a été votre sentiment lorsque vous avez vu pour la première fois votre texte s’animant dans iBooks ? N’est-ce pas le web qui rencontre le livre ?
Je ne sais pas encore bien exprimer ce que représente cette tablette par rapport à ma bibliothèque papier, mais c’est évidemment borgésien !
Web-Objet est donc littéralement un “blog-en-boîte”. Quelle a été votre relation avec votre éditeur, Publie.net, dans l’élaboration de ce travail ? Pensez-vous que le numérique permet de s’affranchir du rôle de l’éditeur ou bien renouveler sa place ?
Ce que m’a offert François Bon, avec cette troisième étape de mon parcours esthétique, la librairie numérique, c’est le retour du « format livre », et donc d’un confort de lecture inégalé. La lecture sur un écran vertical étant plutôt pénible. Et en plus, dans Webobjet1, je voulais pousser la page HTML dans ses retranchements, puisqu’elle n’a pas de limite, et ces « rotulus numériques » que sont les pages HTML sont très perturbantes, puisqu’on s’y perd littéralement ! Ces tablettes et le format epub nous « redonne le texte », et l’on découvre au passage ce que j’ai découvert à la relecture de mon journal de cette année-là, c’est que l’appareil paratextuel influence la perception du texte, et donc, ce formatage « livre » a changé la perception que j’avais de mon propre texte. Sans parler, encore une fois, du confort d’avoir accès à ma bibliothèque numérique, à mes textes numériques dans mon fauteuil préféré, sans le bruit du ventilo de mon portable, qui va démarrer irrémédiablement au moment où il décide de cuire mes cuisses…
Ensuite, pour être honnête, en envisageant le passage en Epub, qui me semblait un format jeune et limité, j’avais fait le deuil d’un certain nombre de dispositifs hypertextuels de la page d’origine. Mais c’était sans compter sur Gwen Català, qui s’est pris au jeu, et a exploré les possibilités de la dernière évolution du format pour tenter de trouver des équivalents au web dans la lecture du livre sur tablette.

 

Est-ce que cette deuxième vie de votre WebObjet vous a donné des idées de projets spécialement numériques ?
Ce retour au texte et au feuilletage, qui me semblait il y a quelques années une régression, me motive en effet pour de nouveaux projets. Après plus de dix ans à m’être consacré à l’ergonomie de la page HTML, ce « retour du refoulé », l’étrange retour du livre que certains de mes amis voient comme un vrai voyage vers le passé, est pour moi le retour de mon plus vieil ami !


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1ère mise en ligne et dernière modification le 21 juin 2011
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