votre chambre au Hilton [13]

le voyage de "L’incendie du Hilton" dans les blogs


• dossier L’Incendie du Hilton sur Tiers Livre

Treizième chambre au Hilton, et j’ouvre une nouvelle série après cette première de douze, pour remerciement particulier à Dominique Dussidour, et voir dans l’insusable et souple machine remue.net le livre pris par son biais spatial et urbain, et repris dans le contexte de mon travail en général, ce qui est facile à dire quand on lit un texte pareil, mais justement probablement l’instance dont on est soi-même le plus privé, sauf à continuer la marche dans le noir, en attendant le nouveau démarrage de l’écriture brute, imprévisible.

Donc c’est ici : Et qui serait en possession de la frontière ?.

 

présentation de la première série
Touché de ces premières réactions à la lecture de mon Incendie du Hilton, dans les deux cas non pas mimer la critique littéraire, mais – comme on aime à le faire sur le Net, où l’instance subjective est indémêlable de l’intervention même – comme deux émergences du temps de lecture dans le blog de l’auteur/lecteur, qui n’a pas à dénaturer le ton et la matière de son blog pour accueillir le compte-rendu... A lire, donc, à mesure des mises en ligne...

article 1
 24 août : Philippe De Jonckheere en son Désordre, et Jérémy Liron dans ses Pas Perdus. Deux regards de plasticiens (?), photographes (?) qui ont contribué à façonner le mien, et le web pour nous tous c’est certainement cette école en commun. [1].
 22 août : Une chambre au Hilton des livres aussi pour Lignes de Fuite qui propose ce montage d’extraits avec retour sur le Net.
 25 août : ecture de Nicolas Gary sur ActuaLitté, avec cette fois petit accent sur l’édition et le livre...
 26 août : d’étrenner la reprise du Journal de Thiron-Gardais de Jean-Claude Bourdais. Qui complète depuis par une page sur Anticosti et une page sur Dollarton, le livre entraînant un nouveau cercle virtuel.
 1er septembre, chambre au Hilton pour Claro : rouvrir les heures, touché de l’approche de l’auteur du Clavier cannibale et connaisseur en Amériques.
 3 septembre : merci à Martine Sonnet de sa lecture dans L’Employée aux écritures - et sa propre interrogation de la ville dans Montparnasse monde.
 7 septembre : écho (en) québécois chez Benoît Mélançon L’oreille tendue
 13 septembre : lu dans 36 poses en mouvement synchrone du livre lui-même, et en mêmes lieux : 36 poses, rencontre d’un livre
 15 septembre : accueil par William Irigoyen sur son blog d’Arte Info Le poing et la plume, et par le réputé Chasse-Clou de l’ami Dominique Hasselmann, me voilà traité d’incendiariste (allumettes fournies).
 19 septembre : alors que le livre est distribué dans les librairies des allées souterraines de Montréal où il a commencé, analyse d’Arnaud Maïsetti – d’autant plus touché qu’à travers son travail sur Koltès et son important travail web je n’ai cessé de le lire toute cette année : Cet endroit est tous les endroits.
 le 11 octobre, passé au mixeur moulineur de La Lettrine, et dans la mise en place livre plus site, la bonne approche – en simultané de l’article d’Isabelle Rüf dans Le Temps, où elle m’associe à l’ami Winckler.
 le 20 octobre, c’est Martine Silber qui me fait l’hommage d’une lecture – combien d’années on a lu ses chroniques théâtre au Monde, et j’avais été tout surpris de la voir arriver dans notre petit (m minuscule) monde du blog pour prolonger curiosité ou découvertes...
 ce 26 octobre, c’est François Taillandier qui s’invite au Hilton, et fait le lien avec Perec et Robbe-Grillet, et la question, qui était formellement essentielle pour moi dans ce livre, de la digression : Panique à l’hôtel dans le Figaro Livres [2].

[1Et merci à Brigitte Célérier de Paumée pour sa veille diligente !

[2

Panique à l’hôtel, par François Taillandier

« L’incendie du Hilton » de François Bon - Une alerte à l’incendie est l’occasion, pour l’auteur, de s’interroger sur le monde urbain industrialisé.

Je m’étonne que l’éditeur de ce livre ait cru bon d’écrire au dos de la couverture : « Après Daewoo, le grand retour de François Bon au roman. » Certes, l’écrivain ne s’oppose pas à ce que l’on imprime la mention « roman » sur certains de ses ouvrages. Pourtant, il a depuis longtemps pris ses distances avec une certaine idée convenue qu’on se fait du roman. La surprise de ce livre, roman ou pas, c’est que François Bon quitte les territoires sociaux qu’on lui connaît, pour s’ancrer sur un incident apparemment des plus futiles. Quelques douzaines d’écrivains, logés au Hilton de Montréal le temps du Salon du livre, sont en pleine nuit évacués de leurs chambres à cause d’une alerte à l’incendie, et conduits dans une patinoire où ils n’ont plus qu’à attendre les événements. Il y aurait là matière à une amusante satire du petit Landerneau littéraire, et l’on sent bien que François Bon saurait le faire, voire que ça le démange, quand il campe un écrivain vénérable et connu (qu’il nous invite à ne pas tenter d’identifier) complètement paumé au milieu de ce bizarre désordre, ou quand il raconte comment les frères Rolin sont allés tambouriner à la porte de Marc Levy.

Pourtant, il ne fait qu’effleurer cette panique dans la basse-cour, qui serait une facilité évidente de son sujet, préférant revenir à ce qui est un des thèmes constants de son œuvre : qu’est-ce que le monde urbain industrialisé, technologisé, surveillé, fait de nous que nous soyons vigile, écrivain en vadrouille, salarié d’usine, cadre en déplacement, comédien en province ?

Dans Montréal et ses souterrains commerciaux reliant la gare, le Hilton, la patinoire et l’enceinte du Salon du livre ; dans cette ambiance d’aéroport et de boutiques standardisées ; au milieu de « responsables sécurité » et d’employés d’hôtel ayant manifestement pour consigne de ne donner aucune information, en pleine nuit, habillés en hâte, dans un total stand-by existentiel, on fait quoi ? Et que vaut ce qu’on fait dans cet univers, que l’on écrive des livres ou que l’on soit l’employée nocturne du seul café ouvert ?

Une ville interchangeable

Au cours d’une digression surprenante (pléonasme !), Bon raconte comment, ayant perdu des points de permis de conduire (de nos jours, il suffit de conduire pour perdre des points), il a participé, à Dreux, à un stage de rééducation, dans un hôtel plus modeste mais tout aussi fonctionnel et froid que celui de Montréal. Oui, qu’est-ce que ce monde contrôlé, encadré, anonyme, fait de nous ou laisse de nous ? On devine l’étendue de l’enjeu lorsque François Bon évoque un débat dans ce même Salon du livre au cours duquel on parle des évolutions de l’édition moderne, soumise aux mêmes lois inconnaissables. Tout va de pair.

Du nouveau roman et de Georges Perec, François Bon a gardé le goût de l’inventaire aride, de la présence brute du monde matériel. Sa singularité est d’y réintroduire ce qu’un autre appelait la question humaine. En outre, il a vu ce que Perec ou Robbe-Grillet n’ont pu voir en leur temps : la ville interchangeable, mondialisée, réduite à sa pure fonctionnalité commerciale et technique. Une phrase, pour moi, signe ce livre : « Qu’est-ce qu’on aurait à apprendre à leur nouveau monde que cela, l’inquiétude ? » C’est la question que pose un écrivain indispensable, qui projette sur ce monde, le nôtre, une lumière implacable et crue.

© François Taillandier _ Le Figaro


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1ère mise en ligne 25 août 2009 et dernière modification le 17 novembre 2009
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