Tours à l’Heure tranquille

fin progressive des centre-villes


En douze ans de présence à Tours, compte à rebours amorcé, les questions touchant à l’urbanisme ont peut-être été mon point d’observation le plus régulier. Ainsi, la main mise, aux cinq portes de la ville, par les groupes de grande distribution, deux pour Auchan, deux pour Carrefour ou Casino, deux pour Leclerc. Et pour le groupe Auchan, lorsqu’ils s’implantent (Chambray-les-Tours, Tours Nord, Saint-Cyr sur Loire) c’est avec leur cohorte de leurs pompes à vie, Leroy-Merlin, Décathlon, Kiabi, Flunch, Saint-Maclou Moquettes, Norauto, Boulanger et j’en oublie : mais une sorte de mise en coupe réglée de la consommation totale des individus, et la normer selon leurs produits et taux de rentabilité.

J’ai pu l’explorer aussi en atelier d’écriture, avec les doctorants et master en urbanisme et géographie urbaine à la Maison des sciences de l’homme des, l’université, et les séances communes avec les bac-pros vente du lycée Victor-Laloux, voir grande surface mon coeur.

C’est triste, ces étendues de parkings, et galeries sur carrelage anticipant la pauvreté qu’elles accueillent. Rotation accélérée des boutiques de chaussures ou fringues, cafétéria standardisée, boutique de téléphonie. L’accaparement aussi de la culture, les meilleurs ventes roman en produit d’appel.

Le centre-ville, en 10 ans, on le voit se déglinguer à vue d’oeil : quand je suis arrivé à Tours, il y avait 4 magasins d’instruments de musique, Thévenet a fermé, Music Paradise finit de liquider son stock, le marchand de guitares de la rue Colbert a fermé, il reste celui qui est spécialisé saxophones et cuivres près de la cathédrale, et celui qui est sur la Tranchée, qui s’est transformé en demi supermarché. Je n’ai plus affaire au centre-ville, une fois toutes les deux semaines, que pour aller visiter la librairie (la mienne, de librairie – "L’heure tranquille" a installé dans sa galerie une librairie Chapitre, la première "hors les murs", tiendra combien de temps, pour vendre quoi...?).

Et pourtant, on résiste mieux sans doute à Tours qu’ailleurs : le Centre dramatique régional a a été reconstruit dans l’hyper-centre (prendrait-on même décision aujourd’hui ?), belles reconversions de logements sociaux en logements étudiants...

Alors, dans ce nouveau quartier où on grimpe les cages à ciment, on installe un nouvel ensemble hypermarché, avec galerie commerciale nouvelles normes, un peu moins parking devant entrepôt. Mais à qui vendront-ils ? Et combien de boutiques identiques vont fermer aux autres portes de la ville ?

Quelle idée, tout simplement, de la ville comme seule instance de consommation, tissu à expansion périphérique indéfinie, et vieux centre pour les bistrots du samedi soir et le reste en musée ?

J’étais allé sur le chantier il y a 1 mois environ, au soir, photographier. C’est ouvert maintenant : un peu de mort en plus.

 


responsable publication François Bon, carnets perso © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 1er juin 2009
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