contribution auteur | Frédérique Paganessi

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proposition n° 2

Ça ne va pas. A vrai dire, cela ne va jamais vraiment. Les mots sont toujours trop… Ou pas assez… Ou encore… Ils ne rendent pas la langue des elfes et c’est pourtant ce que John Ronald Reuel Tolkien veut : faire entendre la langue des elfes dans ses histoires. Il est assis à son bureau de l’université d’Oxford. C’est un petit bureau et il y fait un peu froid. Il sort sa pipe, la bourre de tabac blond, l’allume. Il aspire les bouffées sans même y penser. Il est trop occupé pour cela : il cherche, il traque le mot juste ou plutôt, celui qui « sonnera juste » parce ce que c’est de cela dont il est question : de musique, de littérature, donc de musique avec des mots. J. R. R. Tolkien se creuse la tête. Il connaît une vingtaine de langues, tout de même, il devrait bien y avoir parmi elles… Mais non, aucune ne le satisfait vraiment, aucune n’a tantôt le moelleux, tantôt le rugueux dont il a besoin pour raconter son histoire, pour la faire entendre. J. R. R. Tolkien n’a donc pas le choix : il devra inventer une langue. Inventer une langue ? Oui, inventer une langue et tout ce qui va avec : sa grammaire, son lexique, son étymologie parfois facétieuse. Cela risque d’être long, difficile, il le sait, mais cela sera aussi passionnant. Peut-être même plus passionnant qu’imaginer l’histoire des elfes, qui sait… J. R. R. Tolkien regarde le parc par la fenêtre, tire une bouffée de son cigare. Inventer une langue. Et pourquoi pas plusieurs, finalement ?

proposition n° 1

Elle regarde par la fenêtre. Elle aimerait sortir, mais elle ne peut pas. « Quand on veut, on peut. » Non, elle ne peut pas. Elle voit la rue, les gens qui passent, les voitures, un vélo qu’on pose contre son mur, la vie. Quelqu’un traverse sur le passage piétons. Elle aimerait sortir. Elle ne peut pas. Alors elle regarde la vie des gens dehors.

Le jardin est tout sec, tout gris, tout poudreux. Plein de soleil aussi. Les salades y poussent mal, les pommes de terre un peu mieux. Il faut l’arroser, beaucoup. Il est austère, mais on y est bien. Pour jardiner, pour lire, pour prendre un café en attendant… En attendant quoi, d’ailleurs ? Peu importe et puis chut : une mésange chante !

Il n’est pas là. Elle non plus. Ils ne sont jamais là. C’est même ce qui les définit : ils ne sont jamais là.



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1ère mise en ligne 21 décembre 2018 et dernière modification le 24 décembre 2018.
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