Chloé d’Aniello | Va, Vauvilly, va !

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Je ne sais jamais quoi écrire dans ces cas-là... j’écris beaucoup sur des post-it, d’habitude. Ou sur les murs de la cuisine. Des fois juste un mot, pour la sonorité. Comme perdu, à côté de la louche suspendue. Quoiqu’il en soit la trace écrite m’environne, comme cette citation de René Char réécrite au-dessus du bureau ou celle de Perec juste à côté. Il y a aussi celle de Patrick Guyon à côté de la lampe. Et ça fait longtemps que je n’ai pas écris là, sur les fossiles paupières). Je ne publie pas beaucoup, mais j’aimerais bien. Comme j’aimerais coller des poèmes grandeur nature dans l’espace public, sur les panneaux d’affichage libre, mais pas que. Tiens, mais en fait j’en ai des choses à dire. Écrire.
proposition n° 1

Elle attend perchée sur un tabouret. Sur le lieu de rendez-vous, elle a pris de l’avance. Beaucoup. Quand on revient on prend son temps. On se prépare, on arrive tôt pour se laisser aller au bord des précipices. Ce café d’angle, flots de circulations et flots de Saône. Elle est déjà partie de là en courant.

Revenir exacte sur les ombres blanches. Souvenirs intacts attendrissant l’asphalte.

Avant, elle n’aimait pas faire des phrases en commençant par le sujet. Fuir (verbe d’action). Endosser des gestes fantômes, cela pose une question d’identité. Ça se soulève comme les pas à cette allure. Une marche éperdue, où s’arrêter équivaut à s’évaporer.
Elle ne revenait pas souvent mais croisait des fantômes à chaque fois. Des spectres muraux se décollant de façades d’immeubles, d’enseignes de bars, de panneaux signalétiques, de plaques de rues. Elle avait fui cette ville comme une catastrophe, comme si un jour la colline d’en face avait pris feu. Entrée en éruption.

Du Rhône a coulé depuis. Beaucoup.

La plupart du temps elle préférait marcher. A la descente du train jusqu’au centre ville puis regagner le quartier des habitudes ou des rendez-vous, souvent le même, en haut. Le temps de la marche dans les grandes villes, où le regard balaye des pans entiers de souvenirs, c’est un peu comme éprouver le bruit du rideau avant le spectacle ou le noir grésillant d’une salle de cinéma ; une expérience d’intimité collective. Voire d’ubiquité.
Ce ne sont pas des visages qui reviennent mais des sensations boomerang, que la mémoire alliée du corps au goudron remet en mouvement. Ici tu étais assise. Il buvait un soda. Là vous avez traversé. Il a disparu là. Ici on a rêvé. Il y avait un cinéma.

Penser aux Gisants d’Ernest Pignon Ernest.

A force de marcher elle retrouve des racines dans le béton. A l’intérieur. Pour celle dont la proprioception des pieds se limite à deux feuilles de papier, libres et détachées, c’est une avancée. Un arrêt sur image. Une quatrième dimension dématérialisée, en dehors d’elle-même, avec l’élan pour continuer. Une alchimie particulière de torsion et de frontalité en suspension.

Revenir. Enquête sur les traces du corps urbain dans l’ espace public (reconnaissable par le corps de tous) et privé (collusion, ressac et mouvement intarissable du temps).

Cette fois, elle ne remonta pas. Resta en bas, à quai. Où le goudron avait déjà reçu ses pas, ses empreintes de courses et le poids des tabourets à l’heure des happy hours. Elle chercha même une rue qu’elle ne retrouvait pas. Ce trompe-l’œil. Presque une île.

proposition n° 2

Clair et lumineux, comme le sol, propre et brillant, d’environ cent mètres carrés. Le hall d’entrée. Large et vitré, des deux côtés. Dans le fond, des boîtes aux lettres. Deux rangées de petites plaques dorées collées sur du bois sombre. Puis une plante vivace et luxuriante, qui s’étire devant un renfoncement, un petit recoin d’obscurité. Le tout est un immeuble d’angle, à la proue et à la poupe borgnes, arrêté par le croisement de la rue du 1er mars et du cours Tolstoï.

proposition n° 3

Palier d’ascenseur, rez-de-chaussée. Deux grandes portes grenat, un petit caisson dans la pénombre, le bouton d’appel et sa lumière jaune, peut-être orange qui l’entoure. A droite, un interrupteur à côté d’une porte, un rayon blanc dessous. La cage d’escalier derrière, accès sous-sol et étages supérieurs. En face une porte fermée à clef. Le local de la concierge avec produits vitres, sols, serpillières, balais, chiffons et vaporisateurs. Clair-obscur et liserés lumineux. L’œil se repose, s’habitue. L’interrupteur n’a pas été poussé. Personne ne sort ni entre. Rien ne bouge, pas même le temps. Les bruits de la circulation derrière, sur les côtés. Un bocal Dolby Surround. Dans l’angle mort les bus du cours Tolstoï, les sirènes, les éclats de klaxons. Étouffés. A quelques kilomètres de là sous le sol, une rame de métro circule remplie de passagers.

proposition n° 4

Sortir par le cours, passer devant la banque, traverser. Longer puis gravir les marches de la place. Zigzag entre les assis qui attendent le bus. Regarder là où l’on pose le pied. Constellations de chewing-gums, restes du marché. Slaloms entre les excréments canins quand les pieds des platanes ne suffisent plus. Attendre le petit bonhomme vert, ou pas. Regarder les lampadaires et les caméras qui se prennent pour des lampadaires. Saluer. Traverser derrière un bus, sentir son souffle chaud et carbonique. Témoigner de la nonchalance des pigeons, est-il possible de marcher dessus ? Penser à un pied de dinosaure qui a dû se poser là il y a des millions d’années ou encore aux sabots d’un cheval tirant un fiacre rempli de personnes pressées. Le parvis de l’église, contourné. Longer son enceinte par la gauche jusqu’au collège. Sourire et remettre ses mains dans les poches. Des parents qui attendent sur le trottoir, dans les voitures, presque embusqués. Oh non maman, la honte. Traverser pour rejoindre le magasin de bonbons qui n’existe plus. Souvenirs de ceux qu’on mettait au fond des poches. Oubliés puis retrouvés dans la machine à laver. Retrouver le collège pour le dépasser, la primaire, la maternelle. Marcher sur les rails tous neufs du tramway, passer sous les tilleuls, s’enivrer. Aller sonner chez les copains.

proposition n°5

La haie de troène dépasse un peu de son grillage vert (une nuance plus sombre que celle du troène, remarquable par ses piquets plantés en son milieu tous les mètres environ). Elle continue de courir sur le trottoir puis s’arrête pour laisser place aux quarante-deux barreaux métalliques d’un portail vert sécurisé (du même vert piquet que le grillage du troène) avant de repartir sur le bitume gris clair (du même gris clair que la Citroën garée juste devant deux poubelles d’un gris légèrement plus foncé) cinq mètres plus bas, de l’autre côté.

proposition n° 6

Une fois par semaine Jacqueline Bouchant fait la lecture à sa classe. C’est vendredi et la dernière heure se remplit des aventures de Bilbo le Hobbit. Pendant ce temps-là on ne fait rien. Jacqueline lit et on l’écoute, le regard enfoui sous les bras ou s’égarant par les fenêtres. Dehors les feuilles des arbres s’agitent, des écailles jaunes et vertes, un dragon... tout à l’heure à la récré, on s’est mis à quatre pour faire le tour d’un platane. On aurait dit un bracelet de cheville pour pied d’éléphant. Après on a fait la chorégraphie de Maldon’ avec un rameau de troène fraîchement arraché du grillage. Nettoyer, balayer, astiquer... on était fier de notre accessoire mais notre version de Zouk Machine a pris fin avec un bon coup de sifflet. Au loin sous le sifflet, les moustaches de Monsieur Cody sous le préau, ses sourcils froncés... Djamil vient de faire tomber le taille-crayon de Soraya en s’endormant sur le bureau. Dans la classe ça glousse un peu ; Nora essaie de récupérer le maximum de collerettes colorées la tête dans son cartable. Quelques unes restent accrochées à ses cheveux bouclés. Le silence retombe. C’est normal qu’on soit fatigué, on était tous à Jean Gelet ce matin. A la première heure, tous en maillots de bain. En sortant on a croisé ceux de Jean Vilar qui étaient dans la cour. Vivement qu’on les batte au Méboud ! La compétition de cross c’est la semaine prochaine et il y aura tout le monde, Courcelles, Néruda, ceux du Pont des Planches et même Pierre et Marie Curie. Mais Martin Luther King c’est le mieux. Ça claque comme nom, ça résonne. Comme le Prince de Bel Air (lui aussi il est américain). Pour son anniversaire, on va faire un spectacle au Centre Culturel Charlie Chaplin et on chantera Armstrong devant plein de gens qu’on ne connaît pas. Hier soir, ils ont parlé du Mas du Taureau à la télé ! Ce n’est pas loin de l’école, c’est là où il y a notre mur d’escalade. En sortant il suffit de continuer à droite sur la Promenade Lénine. On peut aussi sortir par le Chemin des Plates après l’étude et prendre le raccourci par le Chemin de la Godille. On entend des éclats de voix de la classe d’à côté. Au CE1 on a tous eu peur de Madame Bonnet.

proposition n° 7

Se borner au plus petit. Soudain l’envie de retrouver ce petit bar tout en longueur, avec le toit en pente dans le recoin, tout au fond, qui offre la meilleur place tranquille, presque cachée. Pour quelles raisons, elle ne se souvient même pas du nom du troquet ? Elle a dû vivre des moments forts là-bas, quelques confidences, des rencontres passionnantes, tragiques, vers les premières bornes de vélos en libre service. Sûrement qu’elle y est déjà retournée toute seule. Elle a dû écrire là-bas.

Elle a beau tourner autour de l’église Saint-Nizier et longer les quais pour rétrécir le périmètre, se perdre dans les petites rues adjacentes et piétonnes, elle se retrouve toujours au Voxx, rue d’Algérie. Plus tard revigorée, elle descendra le quai Saint-Vincent à la recherche d’une terrasse à l’ombre pour son rendez-vous de l’après-midi. Attablée à la Pêcherie, elle contemplera la fresque sur sa gauche et comme un mirage sur le Chott el-Jérid tout lui reviendra d’un coup, presque rien, pas le nom du café mais la sensation en regardant cette rue qui monte à peine que c’était une des façon d’y arriver.
Elle se retrouvera face à quelques chose qui y ressemble, mais pas trop. Le lieu sera fermé, les tabourets posés à l’envers sur les tables. Tout sera sombre. Non. Cela ne pouvait pas être là.

proposition n° 8

Il pleut et ça fait naître la verticalité dans les mouvements. La ligne de chute, la fuite, l’apesanteur. Il pleut et ça revient à l’intérieur, assise devant la table blanche, le plateau de dominos cascade, le crayon à la main ou le pyrograveur. L’expérience chaude de l’empreinte, l’odeur du bois brûlé, une mémoire imprimée dans le corps qui deviendra encre, plume. Le passage de la verticale à la liquidité. Comme le sablier renversé, il est d’abord question de poids. La façon de placer le domino en plastique minuscule où un défaut de fabrication non rare, une boursouflure sur le côté, suffit à tout renverser.

proposition n° 9

Secousses de jambes sous une table, vibrations de chaise, tintement de boucles d’oreilles. Une chaise que l’on tire, des chaussures essuyées sur un paillasson. Glissement d’un bureau-tiroir sous un lit mezzanine. Une porte-fenêtre qui coulisse et des rideaux tirés avec deux petits cordons blancs de nylon. Le bruit d’un néon de salle de bain et le clic d’un interrupteur. Une douche. Des dominos qui se renversent. Le va-et-vient de la pédale d’une machine à coudre, des doigts tapant sur une machine à écrire à un rythme soutenu. Le cycle essorage d’une machine à laver avec le chuchotement d’une cocotte-minute. Les pas des voisins au plafond puis des coups de balais qui se répondent sur des radiateurs. Une sirène de pompiers, le soupir d’un bus qui démarre. Un trousseau de clefs qui tombe, cliquetis mat, les portes d’un ascenseur qui se referment. Un rire malade, étouffé.

proposition n° 10

Le produit-vitre, dans ce hall ça sent le produit-vitre, toujours. Le moindre recoin des cents mètres carrés en est imbibé. Même l’ascenseur sent le « propre », une odeur bleue turquoise envahissant tout l’appareil respiratoire. Avec les parois rose saumon, il faut avoir le cœur bien accroché pour se laisser hisser et sentir tout son poids s’ébranler sur la plate-forme. Là-bas, c’était plutôt jaune foin après la pluie, urine et marqueur noir sur neuf étages, occasionnellement. Souvent, lorsque le monte-charge était en panne, on retrouvait ces effluves de mictions et de solvants intactes dans la cage d’escalier. Sinon, quand les portes s’ouvraient sur le quatrième, ça sentait les fèves mijotées pendant des heures. Une odeur nouvelle et forte, ronde et poivrée, qui rajoutait au reste de l’ascension une note de tête insolente et persistante.

Le rideau noir recouvre la fenêtre. Il est fait main, en feutre. De larges bandes de velcro sont cousues aux deux extrémités. Elle disait qu’on dormait mieux dans le noir complet. Dans la chambre, chacune soulève un coin pour voir le visage de l’autre apparaître de l’autre côté. Puis disparaître. Par jeu la main répète inlassablement le même mouvement de va-et-vient contre la vitre. Accélère. Avec dextérité, sans trop tirer. Le pouce cesse de s’agripper et laisse l’espace entre les doigts se remplir de matière noire, jusqu’à l’empoigner. Sans trop de force. Les mains amplifiées font danser le tissu et leurs bras se chargent mutuellement d’envoyer de soyeux rouleaux verticaux le long du rideau.

Elle avait installé un éclairage tamisé dans la petite cuisine, quelques bougeoirs sur la table et sur le plan de travail. Elle avait déclaré que pour ce réveillon de Noël, chacun allait manger ce qu’il voulait. L’ assiette de la cadette était remplie de pâtes papillon, au beurre, agrémentées sur les bords de petits morceaux de saucisson et de cornichons finement découpés par ses soins. La mère et l’aînée se partageaient des escargots au beurre persillé tandis que le père se régalait de pieds paquets dont la sauce tomate laissait quelques traces sur le bord de sa moustache.

proposition n° 11

Ils se font face. Le bar, la pharmacie, le tabac et la boucherie. Ils ont le même trottoir le tabac et la pharmacie, le bar et la boucherie. Si on relie ces quatre points hautement névralgiques, on obtient un véritable carré d’habitudes, à variables fortement circulatoires. On peut s’y rendre directement par angle droit où déborder, en fonction des nécessités, par les interstices, par arrêts dans la quadrature du cercle ; comme par exemple la banque ou la supérette. Ou alors faire comme les éboueurs, un café avant la tournée et regarder la pharmacienne relever son rideau métallique et le courrier. Ou encore la buraliste traverser en vitesse, pour rejoindre la supérette d’où ressort le boucher, toujours fourré à tailler la bavette avec le gérant de la supérette qui une fois seul en magasin, chante à tue-tête tous les tubes qui passent à la radio. Beaucoup de chansons des années 80 qu’on peut entendre facilement depuis la queue extérieure de la boucherie (contrairement à celle qui poireaute devant le néon vert de la pharmacie). Quant à la fromagère, de l’autre côté du tabac, elle rouspète toute seule derrière sa caisse. Comment se fait-il qu’encore aucune file de patients cliente devant chez elle ? Pour la satisfaire, du bar il suffit de traverser. Passer par le cabinet de médecins (qui jouxte la pharmacie) et la pizzeria (dont le propriétaire change annuellement) , puis remonter le petit immeuble jaune. La Tomme d’Abondance est arrivée. Le tableau chevalet ardoise et bois naturel vous accueille, la clochette de la porte retentit ainsi que la température ressentie. Derrière ses lunettes rondes et rouges, la fromagère vous présente tous ces beaux cylindres de lait entier. Il va falloir s’en sortir, faire un choix puis traverser, chercher de la salade chez le chansonnier.

proposition n° 12

Certains montent l’escalier blanc en colimaçon pendant que d’autres stagnent sur l’escalator. Se tiennent à la rampe tout en jetant un œil au niveau supérieur, se retournant parfois à la recherche d’une enseigne, afin d’anticiper le prochain mouvement des membres inférieurs. D’autres profitent de ce rare moment d’immobilité pour laisser le regard se poser sur d’autres immobiles, comme celui qui, nez collé à la vitrine, se demande combien coûte cette essoreuse à salade dernier cri. Ou encore celle qui assise sur un banc, entourée d’emplettes et de plantes vertes, pianote très vite des pouces sur son téléphone. Wesh. Attention à la marche.

proposition n° 13

La vague se retire et laisse le sable crépiter sur sa trace. L’ écume sur les grains de silice. Sur les coquilles vides, du calcaire, demeures abandonnées, gisants biscornus à la suite de Fibonacci. Sur des morceaux de verre polis, comme du cristallin vieilli, ébloui par le soleil, le sel. Des émeraudes cataractes. Des larmes, chlorure de sodium sur des mégots de clopes, petits cylindres blanchis aplatis, recourbés repliés, de la mousse expansée, goudronnée. Sur du plastique déchiré l’écume perdure, parce que le sable est absent, parti fabriquer du béton, du ciment pour construire des autoroutes, des centrales nucléaires, des maisons. Sur des lamelles organiques, brunes, vertes, des cheveux limon, goémon aux boursouflures étranges, jaunes et luisantes. Des bouts de matières s’y s’accrochent, jalousie génétique de mouchoirs trempés, de serviettes hygiéniques ensanglantées. Des bouts de bâton, du bois flotté, des bâtonnets de glace, des emballages de goûter, des auréoles de crème solaire, de l’huile stagnante, se dandinant au gré des flots. Plus loin sur le sable sec, des empreinte de mouettes, de sandales en plastique petite taille, le charbon d’un feu de camp, quelques canettes d’aluminium. A l’horizon des nuages s’accrochent comme du linge sur le fil, parsemés inégalement que quelques mâts viennent transpercer. Bientôt les bateaux à moteur sillonneront, rivalisant d’écume et s’ajouteront sur le fil les paquebots à l’aplomb. Des milliers de gilets oranges débarqueront, coups de sifflets pour ne pas se perdre, à l’inverse de ce qui s’est sûrement passé au large, il y a quelques heures dans l’obscurité. Ni gilet ni terre ferme. Ce matin tout est calme, celui d’avant ou d’après une tempête, sur cette plage à moitié publique, dont l’ accès est interdit la nuit. Un joggeur passe sur la corniche, petites foulées, maillot fluo et écouteurs disparaissant à contre-jour.

proposition n° 14

Elle plonge sa raclette dans le grand seau rectangulaire posé à ses pieds. En se courbant, son dos recouvert d’un châle s’arrondit à côté d’un chariot sur lequel dépassent un balai et le produit vitre. Sur la pointe des pieds elle dessine des allers et retours sur la baie vitrée. Tout son corps s’étire, ses talons décollent de ses sabots blancs. De l’autre côté de la vitre, son regard turquoise transparaît au milieu de ses cheveux sombres et bouclés. Ses bras croisés haut, remontant sa poitrine et cintrant davantage son blaser noir, font remonter ses épaulettes jusqu’aux oreilles. Le cou disparaît au profit du menton, renfrogné. Hochement de la tête, parfois accompagnée par l’abaissement des paupières, à tous les élèves qui passent devant elle. Un micro sourire, tiré retiré, en coin. Juchée sur des talons hauts à l’entrée du collège, elle salue aussi quelques parents ou fronce des sourcils. Soudain un dahu. Elle sort du passage souterrain emmitouflée de couvertures, un bonnet enfoncé sur la tête. La démarche est matinale, chaloupée. Elle fait quelques pas à l’extérieur puis s’arrête quelques secondes le nez au vent sur la jetée. Elle s’ étire un bras puis l’autre, tout en tenant ses couvertures comme une serviette de plage. Elle s’assoit sur l’escalier, face à la mer, sort son petit déjeuner de dessous ses couvertures et le partage avec les mouettes déjà alertes sur le sable. C’est d’abord un tout petit point qui avance à toute allure, puis un visage rougi, allongé, déformé par la vitesse, la bouche grande ouverte criant quelques chose à qui voudra bien l’entendre. Il se retourne sans ralentir, jogging et baskets, large tee-shirt blanc. Il vocifère de plus belle et accélère, derrière lui deux policiers font de même. Il a les cheveux clairs, très courts, les poings resserrés dans la course. Il galope jusqu’à un hall d’immeuble et s’y faufile in extremis. La porte se renferme sur les policiers. La terrasse du restaurant est pleine. Le verre à pied rempli de vin rouge, il s’en saisit en le coinçant entre son premier et son deuxième orteil. La tête et le genou droit se rapprochent, puis le genou s’éloigne, le pied monte, un petit coup rapide, les lèvres atteignent le cristal, la tête bascule en arrière et il refait tranquillement le chemin inverse en déposant le verre à moitié vide au nord son assiette.

proposition n° 15

Je ne t’ouvrirai pas, non, je sais pas qui t’es et puis ta tête ne me revient pas alors je laisse glisser tu vois, j’ai d’autres chats à fouetter, je peux pas tout faire, m’occuper de toi, tout gérer, t’es pas seul au monde tu sais, je suis là je t’ai vu, t’ai salué maintenant basta, ça s’arrête là, le sourire c’était par politesse, pour te dire oui tu existes, tu es bien là, je t’ai vu mais maintenant je ne comprends pas pourquoi tu restes là, c’est pour m’emmerder ou quoi, moi j’aime pas qu’on me regarde pendant que je travaille, et puis colle pas ton nez à la vitre, ça laisse des traces je viens de les faire, et arrête de sourire comme ça c’est flippant, et d’ailleurs pourquoi tu souris au juste, tu te fous de moi c’est ça, j’aime pas ce sourire moi, je sais pas ce qu’il y a derrière, d’habitude c’est mystérieux de pas savoir mais là non, c’est froid comme un bout de métal, ça ferme toute envie, ça repousse même, oui c’est ça ça repousse, ton masque là, que t’as choisi pour moi et ben il est repoussant, en plus on voit même pas tes yeux tu tires trop dessus, mais enfin c’est possible ça d’ouvrir la bouche comme ça, c’est dégueulasse, arrête je te dis je viens de les faire, non, non je ne t’ouvrirai pas non, maintenant je vais t’ignorer, tu me fais peur, non tu n’existes pas, non.

proposition n° 16

Toujours plus à l’ ouest, vois-tu, de façon à s’imaginer l’océan derrière, toujours. Tu peux bien passer du 9e au 7e étage, l’important c’est de traverser, le périph’, le fleuve, les clous, tout. Pour l’instant il n’y a pas d’obstacle car il reste du chemin à faire, toute la terre est encore derrière nous et puis devant aussi, on peut marcher encore comme ça pendant des heures qu’on touchera pas le bout avant longtemps. Bien sûr que c’est autorisé de tourner en rond, ou autour, de faire des pauses quoi. Un jour je suis restée sur ce rond-point que tu vois là, pendant une bonne heure j’ai regardé les voitures passer autour de moi. Il y avait comme un rythme qui s’installait, tchac, tchac tchac, tchac, tchac, tchac tchac tchac, tchac et les corbeaux ont commencé à poser dessus la mélodie comme ça, les pattes tendues sur les fils électriques. Alors d’un coup ça devenait une bande son de voyage, tu vois tu te mets à tout voir, à distinguer les silhouettes derrière les volants et à te placer à côté d’eux, comme ça, juste quelques secondes, un covoiturage du regard et c’est seulement après que tu peux traverser.

proposition n° 17

Le tiroir ne se tire plus, c’est un non-tiroir. Le cliquetis répété des couverts pour preuve, CRCP. Toute la table se moque, un rire enroué comme si la toile cirée était restée coincée en gorge, une toux de bois paresseux soufflée en plein milieu de fourchettes, cuillers, couteaux. C’est la table aux dents métalliques, la table de milieu de nuit. Tant pis. Il n’y aura pas de lame pour se mirer la nuit. Pas besoin de lame pour observer une cuisine de nuit. Il y a les lumières d’en face qui ravivent la flamme et le non-miroir du sol.

Nez collé à la vitrine, on se demande de quel côté on est, à force. Derrière, l’essoreuse à salades. Dernier cri. Elle coûte tant. Haut de gamme quoi. Evidemment verte mais pas salade hein, plutôt pomme. Maintenant on pousse, sur le dessus on appuie, on ne tourne plus. Il y a toujours ce système de centrifugation, oui mais cette fois on pousse, on ne tourne plus. Alors, ce ne sont plus les mêmes muscles en jeu, ça se ressent jusque dans l’omoplate, on descend avec la paume au lieu de serrer le poing et ça change tout.

OK. Je veux bien que mon cinéma deviennent un Monop’. OK. Je veux bien entrer et me souvenir de ce gros plan qui pleure au milieu des chips, ça marche. Faire un tour dans les rayons et refaire ce dialogue avec lui qui pleure dans le chariot parce qu’il a faim. D’accord pour faire la queue en regardant les nouveautés à venir ; l’horoscope, la météo super je prends. Même les recettes en libre-service, roulé de courgettes au chèvre, intéressant, mais sérieusement, il n’y a rien pour s’asseoir ici, vraiment ?

proposition n° 18

Pas besoin de lame pour observer une cuisine de nuit
pas besoin de lame pas besoin de lame
la cuisine la nuit
s’abreuvant de drame une lame mise à mal
pas de reflet bleu pas de flamme
ni de larme qui suinte sur la table de nuit
pas besoin de calme pour une cuisse d’ennui
au service du soin qui reluit
pas de cui-cui
et le soir nu dans le coin qui avale la voisine !
Padam !
Pas à pas la nuit cuisine pour
pour détendre celle qui sévit
dans les contours d’une cuisine la nuit
au service d’un observatoire blême
vé ! comment la nuit détermine
toute la lumière dans une cuisine
pas besoin de lame pour observer la nuit
une cuisine seule suffit

proposition n° 19

L’effort de monter la côte, frottement à la colline, la manger du regard, avancer. Une taupe aérienne, les genoux lampes-torches. Parfois relever la tête pour apprécier la progression, ne pas se retourner. L’horizon découpé en face comme une pièce de puzzle. S’y insérer. Penser à tous ceux qui poussent, ce qui est loin derrière, le château d’eau, les antennes relais, les demoiselles coiffées, puis se remettre aux pieds, les chausser du regard, gros plan sur le béton et sa concrétude grise par endroit constellée, chewing-gums, mégots, papiers ; tout un univers qui se déroule en vitesse sous les semelles et sa profondeur qui porte le vertige comme l’écran de sol au Futuroscope. Ne pas se distraire, ne pas s’arrêter. Les pavés irréguliers, les marches larges et lisses, hautes, se retourner encore, cent quatre-vingts degrés, apprécier la vue, les cheminées, les toits, les gratte-ciels, les allumettes flambées de la raffinerie, les fumées, grises, noires, blanches, enlever la veste, la nouer à la taille, les graffs, les pochoirs sur les murs, monter ne pas s’arrêter, zigzagures entre les gens, le pas rapide, préférer la ligne droite, se tenir à la rampe, se positionner dans le sens de sa circulation, monter, doubler, croiser les rencontres habituelles, extraordinaires. Grimper, c’est une montagne, la pente est raide. Une marche où rien ne compte à part la destination, les autres font de même, parfois quatre à quatre, on s’encourage en silence, le simple fait d’être entouré tient bon. Regarder droit devant les bâtiments qui se rapprochent, marcher comme on marche au même moment à Lisbonne ou à la Réunion, Sofia ou Mamoudzou, sentir le cœur battre, poursuivre, semer, le corps penché, aérodynamique, une taupe aérienne, poussé par le décor derrière, les plaques tectoniques, les étages topographiques, rien ne dépasse, souvenirs sédimentaires, une fois arrivé on ne culmine qu’à l’ombre des arbres, pour exister, seulement les arbres, se dire que d’autres trajets ont déjà été effectués, avant, ce n’est pas la première fois que les pierres supportent nos poids passagers.

proposition n° 20

Remplie de prospectus, la boîte est pleine. La pile s’amasse dans le fond, frotte les bords recourbée sur son poids. En se pliant aux exigences de l’espace, de fines couches de papier glacé recouvrent de fines couches de papier journal, ou vice versa. Certains s’éloignent, d’autres se rapprochent. Armoire soldée, aspirateur en promo, cartable ou pommeau de douche se collent les aux autres, têtes ou pieds en l’air, pour la première fois. Dans un coin, une paire de baskets et le tout dernier barbecue s’observent en chiens de faïence tandis que là-haut, un tapis de bain observe la scène en équilibre sur un porte-manteau dont les bras dépassent dehors, accompagnés de notes de bas de pages et gros chiffres fuchsia.

proposition n° 41

La vague se retire et laisse le sable crépiter sur sa trace [1]. L’ écume sur les grains de silice [2] [3] [4]. Sur les coquilles vides, calcaires, demeures abandonnées, gisantes biscornues à la suite de Fibonacci [5].

La vague se retire [6] et laisse le sable fourmiller, trépider sur place. L’ écume [7] crépite [se précipite] sur les grains de silice. Sur le calcaire, le nacre des coquilles vides, ces gisantes biscornues demeurant abandonnées jusqu’à la cime [8].

proposition n° 42

entre 15 et 16

De l’autre côté du hall il l’observe en train de lui faire de grands signes. Elle n’a pas compris, on ne comprend jamais rien au travers des vitres. D’ailleurs elle à l’air effrayé, c’est affligeant. Voire humiliant parce que c’est toujours la même chose avec la peur, ça fait comme un masque de mocheté que tu gardes dans le miroir sans autres reflets possibles au moins pendant vingt-quatre heures. Ça reste, ça colle à la peau la peur, surtout quand elle se voit dans les yeux d’un autre, la pupille se dilate et pouf, ça bouffe tout, l’iris se rétrécit jusqu’à seulement définir les contours ultras fins (ici turquoises) d’un trou noir. Alors d’accord, se dit-il, c’est à ça que je ressemble ici maintenant, avec toi. Ce nouvel état de fait ne le fera pas bouger d’un cil, mais au contraire le plongera dans un état de profonde méditation. Ce qui nous laisse le temps de constater, sans aucune arrière-pensée, que ce n’était pas la première fois qu’il se retrouvait devant une porte fermée, façon de parler. La plupart du temps il écopait au mieux d’un non affirmatif à chaque fois qu’il apparaissait devant quelqu’un. Il présente bien pourtant, avec son costume finement rayé et ses mocassins vernis, pas de quoi effrayer une chouette, mais ce sourire qu’il affichait, rempli de dents blanchies au bicarbonate de soude, fichait la trouille à la majeure partie de ses interlocuteurs. Une fois seulement, au cours de sa longue carrière, cette ouverture plus grande que le visage ne découragea pas Simone, danseuse italienne exubérante prise en stop à la sortie de Nice, qui l’apostropha à peine montée dans l’habitacle.

entre 18 et 19

Azgran repose son stylo à l’endroit tout frais d’encre griffonnée et referme le carnet dessus. Le capuchon noir, digne des plus grands marque-pages, dépasse fièrement du petit parallélépipède encartonné, soulagé du travail achevé ou de s’en être tiré, impossible à dire. Raclement de gorge et lampée de bière, Azgran s’allume une clope et recommande un verre. Ce soir la terrasse est déserte, sûrement la faute à cette purée de pois arrivée quand le jour s’est fait la malle, exactement à l’heure du goûter, sympa le changement d’heure, sympa. N’empêche que, est-ce que je pourrais avoir des cacahuètes s’il-vous-plaît, c’est pas si mal de voir personne ou presque, de deviner les silhouettes qui traversent ou la couleur des carrosseries aux feux rouges. C’est pas si mal, non, c’est pas si mal, n’empêche qu’Azgran se fourrait le doigt dans l’œil s’il pensait que ces divagations l’aideraient à rentrer chez lui un jour. Décroisement de jambes sous la table. Recroisement de jambes sous la table. Azgran n’était pas dupe mais ses jambes ne le portaient plus, à force d’errer sur le bitume, de s’abriter dans les bars, elles avaient perdu toute la lucidité d’un trajet retour.

proposition n° 43

Quand on s’obstine en vain à chercher une rue (juste pour s’assurer que tout ce qu’on a connu n’a pas disparu) on finit par se perdre. Et l’on s’obstine davantage, c’est tout à fait son cas. C’est pour travailler mes cinq sens, se dit-elle, garder alertes l’ouïe, la vue, le goût, le toucher, l’odorat. Et peut-être en développer un autre, qui sait ? Alors c’est par nécessité qu’elle choisit de se perdre, de croire qu’elle est toujours en ville, habitante et logée jusque dans l’écho des pas martelés sur le revêtement urbain. Or cette petite symphonie bitumale continue à se jouer sans elle depuis belle lurette. Elle est partie, elle a perdu sa place à l’orchestre. Illico presto. C’est ainsi. Mais laissons la encore un peu déambuler dans les rues étroites, continuer sa marche frénétique, le nez en l’air à la recherche d’indices providentiels, imitant des allures diverses, suivant une silhouette, trop pressée ou trop lente... car à force de mobilité, on dirait bien qu’elle reprécise les règles du jeu en changeant d’ objectif (rester dans le flot au lieu de trouver cette rue) sans s’en apercevoir. Voilà qui est intéressant, car elle finira par la trouver cette rue, sans la chercher, évidemment. Son corps, alors débarrassé de toute injonction cérébrale, l’amènera pile à l’endroit désiré par un chemin jadis maintes fois emprunté. Une fois remise de cette preuve extraordinaire de la mémoire du corps, elle se tiendra face à cet endroit qu’elle finira par renier tant il avait changé, mais laissons cela car c’est une autre histoire. Maintenant elle débouche sur le fleuve, encore une fois. Elle pourrait tout à fait s’énerver de tourner en rond mais non, au contraire, on dirait que ça l’apaise cette soudaine percée horizontale et s’accorde même une pause avant de repartir battre le pavé en suivant la direction du courant, une sorte de flèche tournant dans le sens inverse des aiguilles d’une montre.

proposition n° 44

C’est presque une île, le manque. Presque. Il y a toujours derrière ce petit bout de territoire que l’on garde pour soi, cette immense croûte qui s’étale comme une pâte qu’on ne regarde pas. Faut plus piétiner, marcher dessus, faut avancer en lui tournant le dos. La fuite, c’est une presqu’île. C’est une presqu’île la fuite, une robe à traîne jaune effleurant tout ce qui affleure, parking, ascenseur, pelouse à pâquerettes, passage piéton, canette de bière, raffinerie, éolienne. Elle n’a pas d’yeux la fuite, elle en manque. Peut-être les a laissés avec la pâte, loin derrière. Peut-être sont restés accrochés au paysage, dans le cadre d’une photo ou sur le cordage d’une balançoire. Peut-être qu’elle les a mangés la fuite, peut-être qu’elle a mangé ses yeux et la bouche qui va avec, pour les recracher plus tard, quelque part, semer des graines de fuite, va savoir. Quoiqu’il en soit elle va là ou va l’eau. La seule direction c’est l’eau. Autour, juste, au moins. La fuite, c’est comme une île manquée qui essaie de prendre le large. Presque.

Au chevet la lumière, non. Éteins, dors. Il y a ce moment où l’on regarde l’ampoule droit dans les yeux avant de l’éteindre, on reste un peu sans ciller car on hésite, on se toise et puis il y a ce clic. Et ces galeries qui redessinent, là, sous les paupières, le souvenir intact du filament incandescent. Au front. Un tunnel. Au revoir la lumière. Non tu ne dors pas, qu’importe, au genou la lampe torche, tu progresses lentement, te camoufles dans l’obscurité. Les pas que tu entends derrière, les soupirs des camarades, tu es loin, ils sont à tes côtés. Toujours. Il y a la sueur qui redescend en bouche, se mélange au sang, à la dent qui fait mal. Tout ça a le goût du fer, tes poumons ont le goût du fer, le même goût que ces rails où les chariots se poussent avec difficulté. Et tu te tais dans cette douleur, plus tu descends et plus tu te tais, comme les autres. Le silence s’arrache à la roche à coup de pioche et se ramasse en courbant l’échine, avec lenteur et effritement.

On regarde devant soi sur un tapis roulant. Il est à côté mais tu regardes devant, pour garder l’équilibre, l’objectif en vue.... de toutes façons il va plus vite que toi, c’est une histoire de référentiel (son allure plus rapide tandis que tu stationnes sur le tapis, le regard périphérique tu vas quand même plus vite que les trois silhouettes assises sur ces sièges de plastique vert ou celles déambulant sur la terre ferme, à tes côtés). Tu vas plus vite que l’escargot ou la fourmi qui traverse au mauvais moment dehors, la poussette rose et le caddie mais qu’est-ce qu’il a dit, tu ne t’en souviens pas, tu regardais droit devant, comme si les mots étais tendus sur l’écran en face, les directions du métro, par où est la sortie, mais qu’est-ce qu’il a dit, est-ce tu accélères, est-ce que tes pupilles se dilatent, vois-tu plus loin maintenant que c’est passé, ce qu’il a dit le retrouves-tu dans cette pub trois fois trop grande pour un seul coup d’œil, sur le manteau violet de la dame devant le retrouves-tu ce qu’il a dit, le frôlement d’épaules, vous étiez pourtant côte à côte mais les yeux devant, toujours en avance sur ce que ça dit, il est parti et tu courroies, tu avances sans marcher comme un membre du paysage.



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1ère mise en ligne 8 juin 2018 et dernière modification le 30 septembre 2018.
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[1ou : La vague se retire et laisse le sable mouillé, une bande – un liseré, crépiter sur sa trace / sa perte, pour souligner l’aspect sonore de cette disparition par étirement, loin du fourmillement des céréales dans un bol de lait frais —quoique

[2voilà donc la tentative d’approcher la notion sonore de l’étirement avec le frottement écume/silice alors pourquoi pas ne pas mettre simplement : écume sur silice, mais en perdant les grains, on perd le crépitement, cet effet d’absorption-laitcéréales. Quoi qu’il en soit, approfondir pour plus tard cette notion du mouvement de la vague qui se retire comme un tapis dérobé sous les pieds pour ensuite mieux représenter l’absence de la vague sur le sable mouillé ; une surprise crépitante, trépidante

[3doute

[4Écume sur grains de silice, pourquoi pas développer la composition pour souligner la rencontre de l’eau salée, de micro-organismes, nutriments minéraux et autres matières en suspension (l’écume) avec le dioxyde de silicium (sable)

[5en spirales logarithmique :1, 3, 5, 8, 13, etc.

[6retire son tapis

[7ou Écume en tant que résultat ; écumât, écumoire ?

[8le 1 de la suite], deviennent alors pépites de surprises une fois mouillées [lorsque tous les anneaux des coquilles sont immergés